Traduction du texte de Pavlo Khomenko publié par
The Occidental Observer, en collaboration avec le forum National social radical. Le document est disponible
en pdf ici.
Au
cours des derniers mois, il y a eu une énorme quantité d’analyses
réalisées dans les milieux nationalistes à l’Ouest sur le
conflit en Ukraine. Ces analyses étaient à l’origine,
logiquement, axées sur les protestations contre le gouvernement
Ianoukovitch, renversé depuis, et se sont depuis reportées vers le
conflit entre Ukraine et les manifestants antiétatiques à
l’intérieur du pays. Les événements ont été étudiés à
partir de points divergents : tous depuis les eurasistes (ou,
peut-être, dois-je les appeler « douginistes »)
jusqu’aux positions tercéristes, et tous les autres entre ces
deux-là.
Bien
que chaque analyse provienne d’un angle différent, presque tous
les éléments d’information des sites internet nationalistes
occidentaux sur l’Ukraine partagent un élément central : une
absence totale, même de loin, de tout point de vue nationaliste
ukrainien. L’absence totale du point de vue nationaliste ukrainien
a donné naissance à de nombreux mythes et à d’étranges
théories. Il peut être comparé à un rideau de fer moderne et
informationnel. Les nationalistes occidentaux et les nationalistes
ukrainiens vivent actuellement dans des univers séparés en matière
d’informations, et cela a conduit à de nombreux malheureux
malentendus. Dans cet article, j’espère finalement apporter le
point de vue nationaliste ukrainien.
Il
y a beaucoup de sujets à couvrir, et je vais essayer d’aborder
chacun d’eux aussi brièvement que possible. L’article est divisé
en trois parties : les mythes concernant l’Ukraine, le
renversement du gouvernement Ianoukovitch, et le conflit en cours
avec la Fédération de Russie. Je regarderais très certainement les
commentaires, les notes et les critiques.
Donc, s’il vous plaît, ne soyez pas timorés. Je ne vous demande
pas de croire seulement le point de vue nationaliste ukrainien. Je
vous demande de vous rappeler que lorsque l’on prend parti de
n’importe quel côté durant un conflit, il faut connaître les
positions des deux parties. Or, en ce moment, c’est pratiquement
impossible. En raison de l’absence généralisée d’informations
des nationalistes ukrainiens, un seul côté est connu.
I.
Mythes de l’histoire
et de la culture ukrainienne
Indépendamment
de toute école doctrinale, chaque nationaliste en Occident
aujourd’hui est essentiellement un dissident au sens classique du
terme. Toutes les personnes à l’Ouest qui pensent que les peuples
occidentaux ont le droit à l’autopréservation risquent des
attaques violentes, de perdre leur travail, ou tout simplement d’être
jetées en prison. Comme pour de nombreux dissidents, le dissident
occidental moderne recherche des informations provenant de sources
alternatives qui apparaissent différentes de celles de ses
oppresseurs.
Ceci
est normal et logique. Pourtant, à propos de l’Ukraine, il y a un
problème. La grande majorité des informations concernant l’Ukraine
obtenues par les nationalistes occidentaux provient finalement du
Kremlin, que ce soit du très grand public Russia Today ou du plus
rebelle Alexandre Douguine. Il n’est pas étonnant, dès lors, que
les mythes répandus à propos des Ukrainiens ressemblent aux vieux
mythes et tactiques soviétiques nous concernant. Je vais essayer de
voir brièvement les plus grands mythes de la propagande contre
l’Ukraine pour les réfuter. Rappelez-vous s’il vous plaît qu’un
article séparé pourra être écrit sur chacun d’eux, et je ne
cherche qu’à résumer les plus répandus aussi brièvement que
possible.
Mythe
1. Les Ukrainiens n’existent pas
Le
plus grand (et le plus anti-ukrainien) mythe est peut-être que
« l’Ukraine est un faux État », « l’Ukraine
n’a jamais été un État », « les Ukrainiens ne
forment pas une Nation », etc. Essentiellement, cette part
de la propagande affirme que l’idée d’un État ukrainien n’est
pas légitime – que cet État a été essentiellement créé à
partir de rien, et que cela est la cause de sa crise politique.
Le
mythe devient plus insultant quand il est affirmé que les
communistes ont créé les Ukrainiens et/ou l’Ukraine. C’est le
plus insultant, puisque ce sont les communistes qui ont détruit le
premier État ukrainien moderne : la République populaire
ukrainienne, qui est née après l’effondrement de l’empire russe
et a été détruite en 1920, après la guerre avec l’URSS.
Le
début du XXe siècle a été de manière générale
chaotique pour les Ukrainiens. Deux États ukrainiens jumeaux,
géographiquement distincts, se proposaient de réunir les
Ukrainiens : la République populaire ukrainienne (centre-est
de l’Ukraine, Ukraine centrale, et une partie de l’Ukraine
occidentale, ainsi que certaines régions actuellement situées à
l’intérieur Russie issues de l’Empire russe), et la République
populaire ukrainienne de l’Ouest (avec le reste de l’Ukraine
occidentale moderne, issue de l’Empire polonais).
[1]
Carte de l’Ukraine à la fin de la Première Guerre mondiale.
Alors
qu’à l’époque, malheureusement, une agression étrangère ne
leur permit pas de se réunir, le fait qu’ils ont tous deux
proclamé un tel but, que tous deux avaient le même hymne national,
le même blason et avaient la même langue, montre clairement qu’ils
appartenaient tous à un même peuple. Ces États étaient identiques
en matière de langue, symboles, etc., et couvraient l’ensemble
– je le répète, l’ensemble – du territoire de
l’Ukraine moderne. On peut voir cela comme la Corée du Nord et la
Corée du Sud, ou l’Allemagne de l’Est et l’Allemagne de
l’Ouest : un peuple, plusieurs États.
C’est
un fait dont les Ukrainiens peuvent être fiers : ces gens, qui
ont vécu séparés, occupés par différents empires durant
plusieurs centaines d’années, ont conservé une langue identique,
se sont considérés comme un même peuple et, quand s’est
présentée la première petite chance, ont immédiatement agi pour
se réunir avec leurs frères. Les Ukrainiens en ce sens sont
exactement comme les Kurdes – un peuple séparé par des
empires étrangers, un peuple sans État, mais très certainement un
peuple, un peuple uni.
Loin
d’être un « peuple fabriqué artificiellement », les
Ukrainiens considèrent notre nation
comme une des plus anciennes en Europe et en Asie : nos racines
se trouvent dans l’ancienne civilisation de Trypillia, qui a posé
les fondations de la nation et de la culture ukrainienne il y a plus
de 5 000 ans. Beaucoup de pratiques spécifiques de la culture
ukrainienne moderne et même des mots datent précisément de cette
civilisation (pour en savoir plus :
Ukraine:
from Tripillya to the Antes [Kiev,
2009] [L’Ukraine :
De Tripillya aux Antes]
et
il
a été prouvé
par l’ADN que la majorité des Ukrainiens sont directement
descendants des différents clans de cette civilisation.
Depuis,
les humains ayant vécu dans les parties habitées de
l’Ukraine moderne ont toujours partagé la même conscience
collective (le trait principal de la nation), depuis le Rus’ de
Kiev jusqu’à l’État cosaque : à aucune époque depuis
(par leur propre volonté, sans tenir compte des occupations
étrangères) des entités distinctes formées par des Ukrainiens ne
se sont opposées les unes aux autres – quand il y a eu une
séparation radicale par deux visions du monde et des cultures
opposées parmi les Ukrainiens, il a toujours existé une
véritable conscience collective en Ukraine durant ces milliers
d’années qui transcendaient même les différentes frontières
impériales. Cela montre un peuple ethniquement uni, existant en
Ukraine, et non des « peuples réunis par les communistes »,
comme la propagande du Kremlin le prétend.
[3]
Les versions de l’ancien Trident en Ukraine, le symbole de l’État
moderne ukrainien.
Bien
sûr, je ne veux pas faire croire que les Ukrainiens forment un
peuple spécial. Tous les peuples en Europe possèdent une longue
histoire et ont leurs propres mythes nationaux. Je tiens simplement à
rappeler que les Ukrainiens ne sont en aucun cas un « peuple
nouveau créé par les communistes », ni des « Russes
polonisés » ; les Ukrainiens sont un peuple unique
qui s’est formé sur l’ensemble du territoire de l’Ukraine
moderne et a été séparé non par notre propre volonté, mais par
la volonté d’empires étrangers.
Cela
est également une preuve importante qui montre le rôle considérable
de l’Ukraine moderne dans la formation de la race blanche – en
grande partie menée par des chercheurs étrangers.
Mythe
2. Catholiques vs orthodoxes
Ce
mythe affirme que l’Ukraine occidentale est catholique et que
l’Ukraine orientale est orthodoxe. Ce mythe affirme que l’Ukraine
orientale favorise la Russie parce qu’elle est orthodoxe, tandis
que l’Ukraine occidentale favorise l’Occident parce qu’il est
catholique.
En
réalité, la majorité de l’Ukraine occidentale est orthodoxe et
les Ukrainiens en tant que peuple sont à près de 90 %
orthodoxes. Le catholicisme en Ukraine occidentale existe sous la
forme du gréco-catholicsme – qui est la religion de 60 % de
trois petites régions (sur un total d’une douzaine de régions) de
l’Ukraine occidentale appelée Galicie. Pourtant, les
gréco-catholiques ont une identité intrinsèquement orientale,
byzantine, cimentée par le fait que cette religion est, en
substance, chrétienne orthodoxe et reconnaît le Pape, qui a été
renforcée à la suite de nombreuses années de conflit malheureux
avec les Polonais catholiques. Le gréco-catholicisme en Ukraine est
né au XVIe siècle lorsque les Ukrainiens orthodoxes
contrôlés par la Pologne se tournèrent vers le Vatican et lui ont
demandé de protéger la culture ukrainienne à l’intérieur de la
Pologne. Le Vatican a accepté, à la condition qu’ils
reconnaissent le pape. Certains refusèrent, certains acceptèrent.
Des conflits internes se produisirent historiquement (par exemple, le
roi ukrainien et meneur des Cosaques Petro Sahaydachny, lui-même de
Galicie (Ukraine occidentale), reprit aux gréco-catholiques les
principaux lieux saints religieux à Kiev), mais ils furent rares et,
de toute évidence, étaient des conflits au sein d’une même
nation.
En
outre, en particulier pendant le XIXe siècle, il y avait,
parmi le clergé gréco-catholique ukrainien – pas dans le clergé
orthodoxe ukrainien – une tendance appelée moscouphile
(pro-Moscou), avec de nombreux prêtres et évêques qui prêtèrent
serment d’allégeance à Moscou après un conflit avec la Pologne,
et appelèrent tous les Ukrainiens à faire de même. Les orthodoxes
ukrainiens avaient moins confiance en Moscou et étaient plus
nationalistes, en particulier au début du XXe siècle.
Je
peux dire avec confiance que, parmi les Ukrainiens, il n’existe
pratiquement aucune tension religieuse. Partout dans le monde et en
Ukraine, s’il n’y a pas d’église orthodoxe, un orthodoxe
ukrainien ira toujours dans une église gréco-catholique ukrainienne
et réciproquement. C’est parce que ces deux religions sont ce que
nous appelons le christianisme kyiévien : elles découlent
directement du temps où le roi Volodomyr christianisa l’Ukraine et
que les Ukrainiens considèrent tous comme « notre ». Un
Ukrainien gréco-catholique considère l’église orthodoxe
ukrainienne avec plus de confiance que l’Église catholique
romaine ;
et un Ukrainien orthodoxe estime l’Église
gréco-catholique ukrainienne plus fiable que n’importe quelle
autre Église orthodoxe. Les nationalistes ukrainiens,
gréco-catholiques et orthodoxes, affirment toujours que, en matière
de religion, l’objectif est de rétablir l’unité des deux
Églises dans une Église ukrainienne (orthodoxe). L’opposition
entre catholiques et orthodoxes n’est donc pas une raison de
division en Ukraine.
Mythe
3. Les
nationalistes ukrainiens sont
des nazis
Ce
mythe affirme que les nationalistes ukrainiens sont tous
essentiellement des néonazis. Le gouvernement de Kiev est
apparemment lui-même fasciste, affirme Russia Today. Ce mythe
a gagné du terrain pour plusieurs raisons : principalement à
cause des symboles que nous utilisons et en raison de l’histoire.
Tout
d’abord, il existe un symbole nationaliste ukrainien qui ressemble
de près à la
rune
du loup. Ce symbole est en fait appelé le symbole Ідея Нації
ou symbole de « l’Idée de la Nation ». Il a été
réutilisé et ressuscité à l’origine par les nouvelles
organisations de droite en Ukraine dans les années 1990. Le seul
mouvement qui l’utilise officiellement comme symbole est le
mouvement des Patriotes d’Ukraine, mais c’est actuellement le
symbole officieux de la nouvelle droite en Ukraine, indépendamment
de toute organisation, utilisé de fait par tous et partout. Il
combine les lettres
“I”
et “N”
de l’ancien alphabet cyrillique ukrainien pour symboliser notre
lien avec nos ancêtres, avec le “I”
qui ressemble à une épée. C’est exactement le même symbole qui
a été utilisé à de nombreuses reprises par les dynasties et
familles princières
ukrainiennes dans
l’histoire.
[4]
« L’Idée de la Nation », symbole utilisé dans
l’histoire.
Pour
l’écrasante majorité des nationalistes ukrainiens, c’est notre
symbole et n’a rien à voir avec la rune du loup. Nous ne
l’utilisons pas parce que nous sommes des néonazis, ou voulons
être comme les Allemands. Nous l’utilisons parce que nous le
considérons comme nôtre et comme le symbole de notre mouvement, qui
transcende toutes les organisations.
Bien
sûr, je ne peux pas m’introduire dans l’esprit de ceux qui l’ont
ressuscité dans les années 1990, mais l’explication qu’ils ont
donnée est celle que je mentionne ci-dessus, comme elle est celle de
l’écrasante majorité. Jamais aucun nationaliste ukrainien n’a
appelé ce symbole une rune du loup. Il est même utilisé maintenant
(malheureusement) par des nationalistes plus libéraux. C’est ainsi
que nous nous identifions à notre mouvement en Ukraine ; depuis
les jeunes l’utilisant sur les réseaux sociaux comme avatar
jusqu’aux professionnels qui s’en servent comme symbole sur leurs
livres, nous le considérons comme notre symbole propre qui
différencie les patriotes des autres groupes en Ukraine. Je ne
perdrai pas de temps en rappelant que ce n’est pas la rune du
loup : peut-être que ceux qui l’ont ressuscité à notre
époque le considèrent ainsi. Le fait est qu’il n’est pas
considéré comme tel par les nationalistes ukrainiens. Il est
considéré comme notre propre symbole, uniquement ukrainien
et uniquement nationaliste.
Sur
la façade de l’hôtel de ville de Kiev pendant les protestations
de Maïdan, des images du poète ukrainien Taras Shevchenko et du
combattant de l’indépendance Stepan Bandera furent accrochées.
»
[« Le
‘portrait d’Hitler à Kiev’ trafiqué tweeté en Russie »]).
Bien
sûr, des symboles comme la croix celtique sont également largement
utilisés par les nationalistes en Ukraine. En fait, avec le drapeau
de l’Ukraine, la croix celtique a même flotté au-dessus de
certains bâtiments pris par des manifestants à Kiev durant l’hiver
2013. Naturellement, nous ne considérons pas la croix celtique comme
nôtre (et d’ailleurs, elle est même appelée la « Celte »
en ukrainien) – ni comme un symbole du national-socialisme. Pour
nous, c’est tout simplement le symbole de l’unité européenne.
Une
autre raison de ce point de vue est peut-être notre sympathie avec
le soi-disant « collaborateur nazi », Stepan Bandera.
Bien sûr, cela n’aurait pas d’importance pour nous s’il avait
collaboré avec le national-socialisme, mais il est étrange pour un
collaborateur national-socialiste d’avoir été interné dans un
camp de concentration allemand pendant la guerre, comme d’avoir eu
plusieurs membres de sa famille exécutés par les
nationaux-socialistes. Pour nous, Bandera est le symbole de quelqu’un
qui s’est battu pour une Ukraine indépendante : rien de plus,
rien de moins.
Au-delà
de Bandera, il y a la division SS Galicie – un mouvement
nationaliste ukrainien allié avec l’Allemagne durant la
Seconde Guerre mondiale (pas seulement allié pour la propagande
soviétique, comme dans le cas de Bandera). Bien sûr, nous les
admirons aussi – mais également parce qu’ils se sont battus pour
les droits des Ukrainiens. En ce sens, la SS Galicie ressemble
beaucoup plus aux mouvements similaires dans les pays baltes ou en
Croatie réellement alliés avec l’Allemagne national-socialiste
qu’au mouvement de Stepan Bandera qui a combattu contre les
nationaux-socialistes autant que contre l’URSS. Il existe de
nombreuses chansons populaires à la fois sur le mouvement
nationaliste de Bandera et sur la SS Galicie.
Ce
qui pourrait surprendre beaucoup de lecteurs, c’est que des
Ukrainiens ayant combattu dans l’Armée rouge sont également
considérés par la plupart des gens comme des héros nationalistes
ukrainiens. Nous distinguons l’Armée rouge, où la plupart des
gens ont été forcés de combattre, de la police secrète comme le
NKVD, où les gens sont allés de leur propre volonté. Ceux-là,
bien sûr, sont des ennemis absolus. Les grands-pères de nombreux
nationalistes ont combattu dans l’Armée rouge, et personne ne
considère cela comme un fait qu’il faut être effrayé de
mentionner. La majorité des anciens combattants de ces armées se
serrent maintenant la main et tous sont heureux que leur rêve d’une
Ukraine indépendante soit enfin devenu réalité. Le fait que trois
armées distinctes existaient pour un même peuple est un petit
exemple de la grande tragédie qui a eu lieu pendant la Seconde
Guerre mondiale – une guerre entre frères.
Pour
résumer, alors que les Ukrainiens sont loin d’être des
« antifascistes », l’opinion de la plupart des
nationalistes ukrainiens, c’est que l’Allemagne a malheureusement
perdu la guerre à cause de son propre chauvinisme ethnique. Si elle
avait reconnu l’État ukrainien en 1941, elle aurait obtenu
d’immenses ressources et main-d’œuvre qui pourraient avoir fait
basculer l’équilibre de la guerre. Mais elle ne l’a pas fait et
a jeté les dirigeants de cet État en prison. Cela a finalement
retourné la plupart des habitants contre elle. Les nationalistes
ukrainiens ne sont pas nationaux-socialistes ou néonazis.
[5]
Différents exemples du symbole de l’idée de la nation utilisés
aujourd’hui.
[6]
Le symbole de l’Idée de la nation à Maïdan, appelé par erreur
Rune du loup. Notez les nombreuses icônes orthodoxes à
l’arrière-plan.
Mythe
4. L’Ukraine divisée
Ce
mythe affirme qu’il existe une sorte de fracture profonde et
éternelle en Ukraine, une division si profonde qu’elle a causé la
« guerre civile ». Ce clivage se situe entre l’Ouest et
l’Est de l’Ukraine est par le fait que l’Ukraine occidentale
serait « ukrainien », tandis que l’Est de l’Ukraine
serait « russe ».
En
fait, chaque parcelle de terre en Ukraine moderne est ethniquement
ukrainienne et appartient à l’Ukraine. C’est une terre où la
nation ukrainienne s’est historiquement formée et une terre où
une conscience nationale unie existait, transcendant même parfois
les frontières.
Je
ne vais pas entrer dans les détails historiques, sauf pour dire que,
après avoir perdu un État au XIIIe siècle face aux
Mongols, les Ukrainiens n’en ont pas retrouvé de nouveau jusqu’au
XXe siècle.
(Pour
un bon aperçu de l’histoire de base, je recommande l’article
d’Émile Durand à Countercurrents
,
[«
White
Nationalist Delusions about Russia »,
« Désillusion
des nationalistes blancs à propos de la Russie »] car il
différencie la Russie
kievienne [qui était
l’État ukrainien originel et peut-être biélorusse qui plus tard
a aidé à former la Russie] et le Grand-Duché de Moscou, qui était
l’État russe originel. Il s’agissait de deux entités politiques
distinctes.)
Lorsque
l’Ukraine a été envahie par les Mongols au XIIIe
siècle, différentes principautés sont tombées au fur et à
mesure, et l’Ukraine unie, intégrant à la fois les parties
occidentale et orientale qui étaient gouvernées par Kiev avant
cette invasion, n’a plus existé jusqu’au début du XXe
siècle.
L’invasion
mongole fut la première d’une longue série d’occupation par les
puissances étrangères. Pourtant, malgré cela, à la fois dans
l’Est et l’Ouest de l’Ukraine, des entités politiques
ukrainiennes existaient sur chaque parcelle de terre de ce qui est
actuellement l’Ukraine. Que ce soit sous la forme d’une plus
grande autonomie au sein de l’empire (comme à l’intérieur de la
Pologne ou de la Rzeczpospolita)
en Ukraine occidentale, ou avec l’organisation d’éphémères
États indépendants et/ou autonomes dans le centre et l’est de
l’Ukraine, il y a un ensemble de preuves qui montre que les
dirigeants de ces états/régimes autonomes se considéraient chefs
d’un peuple particulier, comme les citoyens ordinaires. Ils
parlaient la même langue, avaient les mêmes héros, professaient la
même religion, portaient les mêmes vêtements traditionnels et
possédaient les mêmes traditions. Encore une fois, comme mentionné
plus haut : les Ukrainiens ressemblaient historiquement le
plus aux Kurdes aujourd’hui.
Comme
mentionné ci-dessus, les prédécesseurs de l’Ukraine moderne
peuvent être considérés avec trois États distincts : la
République populaire ukrainienne de 1918 (couvrant une partie de
l’Ukraine occidentale actuelle, de l’Ukraine centrale actuelle,
de l’Ukraine orientale actuelle, ainsi que des terres qui se
situent actuellement en Russie), la République populaire ukrainienne
occidentale (couvrant la majorité de l’Ukraine occidentale
actuelle) et l’Ukraine carpathique (couvrant le reste de l’Ukraine
occidentale moderne).
Il
est assez clair que la République populaire d’Ukraine, même en
1918, était aussi pro-ukrainienne que toutes les entités politiques
qui ont un jour existé dans l’histoire de l’Ukraine. Toute
l’Ukraine orientale actuelle, aussi bien que des terres
actuellement situées en Russie, était dans cet État, et à
l’intérieur de l’État existait une identité nettement
ukrainienne. Après des siècles passés dans l’Empire russe, il
était évident que cette région de l’Ukraine moderne ne s’est
jamais considérée elle-même que comme ukrainienne.
La
seule raison pour laquelle la République populaire d’Ukraine et la
République populaire d’Ukraine occidentale ne se sont pas
réunifiées est que la République populaire d’Ukraine occidentale
ne vécut que peu de temps et n’obtint pas la reconnaissance
internationale que la République populaire d’Ukraine recueillit.
Pourtant, après la chute de la République populaire d’Ukraine
occidentale, les unités de l’État en matière de sécurité
furent immédiatement transférées en République populaire
d’Ukraine et, aux côtés des unités ukrainiennes de l’armée de
l’ex-Empire russe, y formèrent une armée nationale. Sans aucun
conflit que ce fut.
Encore
une fois, c’est quelque chose d’incroyable : des hommes
venus de différents empires, qui avaient vécu dans différents pays
durant des centaines d’années, s’entendirent immédiatement les
uns avec les autres et formèrent une armée. Les Kurdes d’Europe.
Par
ailleurs, un fait intéressant est que l’Ukraine de l’Est était
à l’époque originellement farouchement anti-Moscou – elle
proposa de se rapprocher de la Pologne comme meilleure solution pour
une Ukraine indépendante, tandis que l’Ukraine occidentale était
à l’origine farouchement anti-polonaise, et voulait se rapprocher
de Moscou.
Alors,
que s’est-il passé exactement ?
Pourquoi
l’Ukraine orientale était-elle alors le cœur du nationalisme
ukrainien, et pourquoi ne l’est-elle plus maintenant ?
Pourquoi était-elle le siège des intellectuels ukrainiens qui
décidèrent comment libérer l’Ukraine occidentale et créer –
enfin – une Ukraine unie, et cela est-il bien différent
aujourd’hui ? Comment le cœur de l’identité ukrainienne
dans les années 1920 est-il devenu le cœur des séparatistes
anti-ukrainiens en 2014 ?
La
réalité politiquement incorrecte est que la division de l’Ukraine
moderne est en grande partie le résultat de l’Holodomor, la famine
organisée des années 1932-1933. Ce génocide a spécifiquement visé
les Ukrainiens et la présence culturelle ukrainienne dans cette
partie de l’Ukraine, qui était alors incorporée à l’Union
soviétique ; l’Ukraine orientale, aussi bien que les zones où
vivaient nombre d’Ukrainiens et qui sont aujourd’hui intégrées
à la Russie, comme la région du Kouban. Il n’y a pas de
division entre les Ukrainiens. Il y a des divisions entre les
Ukrainiens et les descendants de ceux que le
gouvernement soviétique a importés en Ukraine orientale pour
remplacer les Ukrainiens assassinés. Nous sommes tous bien
conscients que la famine elle-même n’a pas été commise par les
Russes. Pourtant, la population ukrainienne de la région a été
largement remplacée par des Russes.
Oui,
il y a d’autres différences : un côté de l’Ukraine a été
historiquement plus influencé par la Pologne, et l’autre par la
Russie ; d’un côté, on trouve plus de catholiques que de
l’autre. Mais il ne s’agit que de différences mineures, qui
n’ont jamais empêché les Ukrainiens, à l’Est comme à l’Ouest
de l’Ukraine, à travers l’histoire, de se considérer
mutuellement comme un peuple uni. En outre, de telles différences
existent dans tous les pays. La division de l’Ukraine actuelle est
le résultat direct de l’Holodomor et la répression politique de
masse contre l’identité ukrainienne qui a suivi, créant une
Ukraine orientale, centre du nationalisme ukrainien, une région
vidée et sans identité.
Les
principaux penseurs modernes du nationalisme ukrainien à travers
l’histoire ne sont pas d’Ukraine occidentale (comme Russia
Today ou Alexandre Douguine pourraient le prétendre), mais de
l’est de l’Ukraine : tous, depuis Dmytro Dontsov (le grand
penseur traditionaliste ukrainien et théoricien du nationalisme
intégral, qui travailla activement avec Stepan Bandera), à Mykola
Mikhnovsky, Mykola Stsiborsky, Taras Shevchenko et d’autres… Tous
ces intellectuels avaient la vision d’une Ukraine unie,
indépendante, et n’avaient aucune sympathie pour Moscou, qu’ils
considéraient comme un oppresseur.
Le
référendum sur l’indépendance, dans lequel chaque zone de
l’Ukraine actuelle a voté pour décider si elle voulait faire
partie de la future Ukraine, indépendante, s’est déroulé en
1991. Les résultats peuvent être vus ci-dessous. Inutile de dire
que l’écrasante majorité de la population, dans toutes les
régions du pays, ont voté pour faire partie d’une Ukraine
indépendante. En général, le soutien à l’unité et
l’indépendance ukrainiennes a été entre 95 % en Ukraine
occidentale à 90 % en Ukraine orientale. Il est également
intéressant de noter que l’opposition au vote a été plus forte
dans les zones comptant le plus grand nombre de Russes ethniques. En
effet, seule la Crimée, qui est la seule région de l’Ukraine où
la majorité de la population est ethniquement russe (en grande
partie en raison de l’Union soviétique) les résultats furent
proches, avec 56 % de oui, 41 % de non, le reste
s’abstenant ou votant nul.
[7]
Les pourcentages du « oui » au référendum 1991.
[8]
Les pourcentages du « non » au référendum 1991.
L’Ukraine
est un pays complètement homogène. En 2001, les Ukrainiens
ethniques composent près de 80 % du pays. Ils ne forment pas
seulement la grande majorité dans l’ensemble de l’Ukraine
occidentale, mais aussi dans Ukraine orientale. Ainsi, les articles
de presse dépeignant l’est de l’Ukraine comme « peuplée
de Russes » sont complètement mensongers. Les Ukrainiens
constituent la grande majorité de la population, même s’il existe
une minorité russophone. Les Russes sont environ 17 % de la
population de l’Ukraine, et environ 15 % à 30 % de
l’Ukraine orientale, en fonction de la région, les autres étant
des Ukrainiens ethniques.
En
dépit de l’Holodomor, l’est de l’Ukraine reste résolument
pro-ukrainien. Une petite anecdote, qui me semble assez parlante :
ceux qui parlent d’une Ukraine divisée devraient simplement
regarder les matchs de l’équipe de football ukrainien dans
n’importe quelle ville d’Ukraine et observer comment les gens
célèbrent une victoire. Quelle que soit la ville, le soutien est
très fort, où que se situe le match. Dans le cas de pays réellement
divisés – comme en ex-Yougoslavie – je n’imagine pas la
Croatie jouer à Belgrade et étant soutenu ou des supporteurs
chantant l’hymne serbe à Zagreb. Pourtant, l’équipe nationale
ukrainienne peut jouer n’importe où dans l’est de l’Ukraine et
recevoir un soutien incroyable, comme ce fut le cas durant l’Euro
2012. C’est mineur, répétons-le.
Même
aujourd’hui, et malgré tout de cette histoire, il n’existe guère
de la fracture entre l’est et l’ouest de l’Ukraine. L’est de
l’Ukraine est aujourd’hui largement russophone. Ceci est le
résultat de l’Holodomor et des violentes campagnes de
russification menées par l’URSS qui ont suivi. Pourtant, la grande
majorité des Ukrainiens de l’est considèrent l’ukrainien comme
leur langue maternelle. Tout le monde en Ukraine orientale parle
l’ukrainien couramment, et, dans une génération, la majorité
parlera ukrainien dans la vie de tous les jours. Il y a
actuellement une renaissance et un réveil de l’identité
ukrainienne également à l’œuvre dans l’est de l’Ukraine, la
grande majorité des habitants reprenant ce qui leur revient de
droit. C’est ce qui arrivera et c’est évidemment quelque
chose qu’une minorité agressive de la population – en grande
partie les descendants de ceux qui furent amenés en Ukraine après
l’Holodomor – rejette.
Pour
résumer, les Ukrainiens sont, donc, une véritable nationalité avec
une longue histoire. Bien que les Ukrainiens soient très loin d’être
antifascistes, l’Ukrainien moyen se voit comme un nationaliste
ukrainien, pas comme un national-socialiste. Il n’y a pas de
division géographique ou religieuse des Ukrainiens. Il y a une
fracture entre ceux qui, à l’intérieur de l’Ukraine,
reconnaissent l’Ukraine et ceux qui détestent l’Ukraine, comme
en Occident les anti-Blancs.
II.
Maïdan et Ianoukovitch
En
février 2010, Viktor Ianoukovitch est devenu le président de
l’Ukraine, après avoir battu Ioulia Timochenko au second tour des
élections. (En Ukraine, si aucun candidat n’obtient plus de 50 %
des voix au premier tour, les deux dirigeants s’affrontent dans un
second tour en tête-à-tête). Ianoukovitch a obtenu 48 % des
voix, contre 45 % pour Mme Timochenko.
Les
relations étroites entre Timochenko et Vladimir Poutine sont bien
connues en Ukraine. En fait, l’emprisonnement de Timochenko – qui
a été l’une des rares actions du régime de Ianoukovitch que la
grande majorité des Ukrainiens, et surtout les nationalistes
ukrainiens, ont soutenu – n’était pas seulement farouchement
dénoncé par l’Occident, mais aussi par la Russie. C’est
essentiellement Timochenko qui a vendu, alors qu’elle était
première ministre, l’Ukraine à la Russie avec des contrats
gaziers accompagnés d’une grande corruption – ce qui fut l’une
des raisons pour lesquelles elle a été envoyée en prison. C’est
à cause de ces contrats que les nationalistes ont exhorté à voter
contre les deux candidats aux élections de 2010.
Dans
l’ensemble, les oligarques les plus influents en Ukraine ont
soutenu Ianoukovitch – c’est souvent le facteur décisif
dans les élections ukrainiennes. Il est à noter également que, en
effet, l’Ukraine orientale a donné à Viktor Ianoukovitch une
majorité absolue, alors que Timochenko a obtenu le soutien d’une
vaste majorité en Ukraine occidentale (bien qu’elle soit elle-même
une russophone d’Ukraine orientale). Ceci est largement dû non à
des oppositions en Ukraine, mais à des batailles internes entre
oligarques, qui contrôlent en grande partie les médiats et les
entreprises dans leurs régions respectives. Dans les deux régions,
les oligarques ne sont généralement ni Ukrainiens ethniques, ni
Russes ethniques, et changent souvent de côté, mais c’est un
autre sujet pour un autre jour.
En
effet, les plus importantes questions internes à propos desquelles
les médiats occidentaux et russes prétendent qu’elles
« divisent » l’Ukraine, nous constatons une forte unité
nationale.
Par
exemple, concernant la décision de faire du russe une deuxième
langue d’État, seulement 4 % de la population considère
qu’il s’agit d’un problème important, et seulement 28 %
ont
soutenu l’initiative.
Sur les 28 % qui ont soutenu l’initiative, encore une fois,
nous remarquons une division sur des bases ethniques, avec une grande
majorité des Russes ethniques soutenant l’initiative, et une
grande majorité d’Ukrainiens s’y opposant.
Faire
du russe une deuxième langue d’État était, en effet, l’une des
promesses électorales de Victor Ianoukovitch. Il convient de
mentionner, cependant, que ce n’était que l’une de ses
nombreuses promesses ; et en aucun cas ce soutien pour cette
initiative n’indique un soutien global, pas plus que le soutien de
François Hollande par les musulmans en France n’indique un soutien
de leur part à sa politique antifamille et prohomosexuelle. En fin
de compte, la loi adoptée par le Parlement sous Ianoukovitch a été
défendue plus fortement par les communistes : donner un
prétendu « statut régional » pour toutes les langues
dans toutes les régions où au moins 10 % de la population ne
parle pas ukrainien comme langue maternelle. Cela concernant non
seulement le russe, mais aussi le hongrois, le roumain, et dans
certains cas, peut-être même l’anglais. Il est évident que
l’objectif d’une telle loi était d’inverser les tendances de
re-ukrainisation à l’œuvre dans toute l’Ukraine et de
promouvoir le multiculturalisme. C’est la révocation immédiate de
cette loi après la chute du gouvernement Ianoukovitch qui a conduit
la Fédération de Russie à parler de « l’oppression des
Russes en Ukraine », en dépit du fait que la Russie n’a
jamais rien fait de semblable pour l’une de ses minorités
nationales qui, à la différence des Russes en Ukraine, n’ont pas
de patrie en dehors de la Russie.
La
période Ianoukovitch a été une ère de corruption politique
intense dans laquelle les membres de sa famille ont détourné
illégalement des milliards de dollars. Les gens ordinaires ont été
terrorisés par la « famille » (désignant Ianoukovitch
et ses proches collaborateurs avec leur mafia) pendant quatre ans
dans toutes les régions de l’Ukraine. Cette période a été
également celle de la liquidation complète de l’Ukraine –
principalement à l’Ouest. Après avoir vu une grande amélioration
au cours de la présidence de Leonid Koutchma (du milieu des années
1990 à 2005) et la stagnation au cours de la présidence de Viktor
Iouchtchenko (2005-2010), les conditions de vie ont commencé à
baisser. En 2014, le soutien à Ianoukovitch a diminué à mesure que
la grande majorité de la population en avait assez.
Comparer
Ianoukovitch à Assad ou Milosevic est tout à fait inapproprié –
à commencer par le fait que Ianoukovitch était en grande partie
pro-occidental et n’a rien fait pour protéger sa propre
population. C’est son régime qui a permis à Israël de kidnapper
l’ingénieur du Hamas et grande figure politique Dirar
Abu Sisi,
qui avait trouvé refuge en Ukraine, et le ramener en Israël. C’est
Ianoukovitch qui, pour un prix dérisoire, a donné à l’Amérique
tout l’uranium enrichi de l’Ukraine et a poursuivi la destruction
de ce qui restait de l’armée, autrefois puissante, de l’Ukraine.
C’est le régime de Ianoukovitch qui a permis la première ‘gay
pride’ soutenue par le gouvernement en Ukraine, qui a eu lieu dans
le plus grand secret grâce à une sécurité maximale, mais a été
couverte, défendue et promue ensuite par tous les médiats d’État
et les médiats fidèles à son clan (qui, contrairement à la
population, savait où et quand cela se passait). C’est
Ianoukovitch et son gouvernement qui ont le plus fortement fait
pression pour vendre l’Ukraine à des sociétés américaines et
ont vu les terres ukrainiennes et la nature détruites par la
fracturation pour la recherche de gaz de schiste. Ce sont des
politologues américains que Ianoukovitch a embauchés pour l’aider
à gagner la présidence et ce sont des lobbyistes américains qui
ont travaillé pour lui à Washington. Ce sont quelques-uns des
nombreux exemples.
D’ailleurs,
en ce qui concerne la fracturation et le gaz de schiste, la Russie
s’oppose avec véhémence à la propagation du gaz de schiste comme
étant une menace directe pour Gazprom. Ianoukovitch, son clan, et la
quasi-totalité des médiats progouvernementaux en Ukraine ont
constamment montré ceux qui osait s’opposer à la recherche de gaz
de schiste en Ukraine comme des gens qui étaient payés et embauchés
par Gazprom. Cependant, la fracturation et la recherche de gaz de
schiste en Ukraine
ont également été farouchement dénoncées
par les nationalistes ukrainiens.
Le système a répondu en
traitant les nationalistes ukrainiens d’agents russes. Aux côtés
des nationalistes, qui ont été le plus fermement opposés à cela,
l’opposition aussi s’est montrée défavorable.
En
ce qui concerne le premier défilé de la ‘gay pride’, c’est
l’unité des Berkut de la police nationale – la même unité que
les manifestants ont affronté durant les manifestations à Maïdan –
qui a battu sans pitié tous les contre-manifestants, en particulier
les nationalistes, mais aussi beaucoup de chrétiens plus âgés, qui
avaient découvert où le défilé allait avoir lieu. Quand on
comprend cela, la raison pour laquelle beaucoup de nationalistes
ukrainiens considèrent ces « nationalistes » et
«traditionalistes » occidentaux qui chantent des odes aux
Berkut (on peut trouver de tels groupes sur Facebook) comme étant
rien moins que schizophrènes devient claire.
Il
n’y avait aucune raison logique pour que l’Occident s’oppose,
même légèrement, à Ianoukovitch. Il était le chef le plus fidèle
à l’Ouest que l’Ukraine avait eu. Il était plus pro-occidental
que de nombreux dirigeants de pays à l’intérieur de l’UE.
Les
protestations à Maïdan ont commencé à la mi-novembre 2013, après
que le gouvernement Ianoukovitch eut refusé de signer un accord
d’association avec l’UE lors d’un sommet spécial.
Il
y a quelques années, personne ne se souciait que l’Ukraine signe
un accord d’association avec l’UE. L’accord était largement
ignoré par la grande majorité de la population. On ne savait rien à
ce sujet. Il convient également de noter qu’il ne s’agit pas
d’une adhésion ; le même genre d’accord a été signé
avec la Syrie, l’Arabie saoudite, Israël et d’autres pays non
européens.
Cela
a changé à peu près un an après que Ianoukovitch soit devenu
président, lorsque les médiats et Ianoukovitch ont commencé à
promouvoir l’entente comme la solution à tous les problèmes de
l’Ukraine. Quiconque s’y opposait ou même à une partie de
celui-ci était contre l’Ukraine, selon ses partisans. Incidemment,
c’est le gouvernement Ianoukovitch qui, le premier, sous le
prétexte de l’accord, a essayé d’intégrer la propagande
homosexuelle dans les lois de l’Ukraine, l’interdiction de la
« discrimination contre les homosexuels », comme la
promotion de nombreuses autres initiatives anti-famille. Cela a été
vivement contesté par les nationalistes, et dénoncé, prudemment,
par l’opposition. Selon la propagande répandue par les médiats en
Ukraine, les nationalistes et l’opposition s’opposaient à ces
initiatives parce qu’ils étaient contre le progrès de l’Ukraine
et contre la signature de ce « saint » accord.
Heureusement, cette initiative a finalement été vaincue après une
large protestation.
Inutile
de dire que, grâce à Ianoukovitch et ses efforts, dans toutes les
régions du pays, le soutien à l’accord a progressé. Il est donc
logique que, lorsque Ianoukovitch a soudainement décidé de ne pas
signer l’accord, sans aucun avertissement, il y eut des déceptions.
(Remarque : il a été découvert plus tard que l’accord n’a
pas été signé en raison de conditions extrêmement défavorables
pour certaines industries ukrainiennes. Le gouvernement arrivé au
pouvoir après Ianoukovitch a également refusé de signer le même
accord jusqu’à ce que ces conditions aient été modifiées).
Cette
déception, cependant, était loin d’être suffisante pour
provoquer des troubles sociaux massifs. Quand l’information sur la
non-signature de l’accord a été largement connue, rien ne s’est
passé, dans aucune région du pays. Beaucoup avaient pu être déçus,
mais personne ne s’en souciait vraiment.
La
seule manifestation a réuni peut-être quelques dizaines de
personnes, ou tout au plus une centaine, dans le centre de Kiev à
Maïdan. De telles manifestations ont lieu en Ukraine chaque jour. La
manifestation n’a pas été couverte par les médiats et personne
n’y a prêté réellement.
Plus
exactement, personne n’y a prêté beaucoup d’attention jusqu’à
ce que, pour des raisons inconnues, la police a utilisé une force
excessive pour disperser les manifestants. Répression illogique. Les
manifestants se seraient dispersés tranquillement en une heure ou
deux, sans que personne ne sache jamais que la chose eût lieu. La
nuit suivante, plus de gens sont allés protester, mais cette fois
contre la police. Au cours de cette manifestation, il y avait plus de
caméras présentes. Une force extrême a été de nouveau utilisée,
sans aucune raison, apparemment. (Remarque : il a été
découvert plus tard que c’était en raison de luttes internes dans
le clan de Viktor Ianoukovitch : l’évacuation a été
ordonnée par une personne proche de Ianoukovitch nommé Sergei
Lyovochkin, lors d’une tentative de forcer le ministre de
l’Intérieur à la retraite.) En tout cas, les nouvelles et les
vidéos de jeunes étudiants et anciens retraités brutalement battus
ont été publiées.
Ce
fut la goutte d’eau. Le Maïdan a officiellement commencé et
l’opposition de masse au gouvernement Ianoukovitch a finalement
atteint son point d’ébullition.
Ainsi,
le Maïdan n’a pas commencé comme une protestation pro-UE,
comme le prétendent les médiats russes et occidentaux, mais par une
protestation contre le gouvernement et la police.
En
prenant un peu de recul, il est important de comprendre exactement ce
que cela signifie d’être pro-russe ou pro-UE en Ukraine, comme
cela est très mal compris de l’extérieur du pays.
En
ce qui concerne l’UE, il est important de comprendre qu’être
pro-UE en Ukraine a un sens complètement différent de ce que cela
représente à l’Ouest. En Ukraine, il n’y a pas de politiciens
libéraux au sens occidental du terme. Parmi la population moyenne,
être pro-UE n’a absolument aucune connotation idéologique. Je
connais personnellement des gens qui répandent les Protocoles des
Sages de Sion et se considèrent comme les traditionalistes, mais
soutiennent l’UE, et les gens très libéraux qui s’opposent avec
véhémence à l’UE. L’UE en Ukraine est considérée uniquement
en termes économiques. Ceux qui soutiennent l’Union européenne la
soutiennent parce qu’ils pensent qu’elle va immédiatement mettre
fin à la corruption en Ukraine, permettre l’amélioration des
routes, l’augmentation des salaires, et, en général tout
simplement rendre la vie meilleure.
J’insiste
sur le fait qu’en Ukraine, en matière d’idéologie, le soutien à
l’UE signifie moins que rien. Il ne s’agit que d’un sujet
économique et des conditions de vie. Beaucoup pensent que l’adhésion
à l’UE va en effet mettre fin à la corruption en Ukraine et
obtenir de meilleures conditions de vie. Ils ne voient pas l’Union
européenne comme favorisant une immigration non blanche et la fin
d’un fort sentiment d’identité nationale.
Être
prorusse en Ukraine n’a pas non plus beaucoup de connotations
idéologiques. Dans le sens direct du mot, habituellement, seuls les
Russes ethniques, ainsi que les personnes âgées qui ont vécu toute
leur vie dans l’Union soviétique, sont prorusses. Il faut
comprendre que, contrairement à ce qui est parfois affirmé à
l’Ouest (probablement pour simplifier une réalité complexe), des
politiciens comme M. Ianoukovitch n’ont pas fait campagne sur une
plate-forme prorusse, et son parti ne défend pas une plate-forme
prorusse. Au contraire, certains éléments ont été ajoutés (comme
l’appui à la langue russe) pour obtenir le soutien de ce segment
de la société. Ceci était tout à fait efficace. En général, les
forces prorusses en Ukraine voient les nationalistes ukrainiens comme
leur principal ennemi – pas les Américains, ni qui que ce soit à
l’Ouest. Cela devient évident quand on regarde le comportement de
ce groupe, comme décrit en détail ci-dessous.
Il
convient également de mentionner qu’être prorusse et pro-UE en
Ukraine est loin d’être mutuellement exclusif. Bien au contraire :
les lois linguistiques régionales, décrites ci-dessus et soutenues
par des politiciens prorusses du parti communiste – lois qui ont
une intonation clairement antiukrainienne – ont été justifiées
comme étant bonne, car « cela fonctionne comme ça dans
l’Union européenne », où règne le multiculturalisme.
Dans
l’ensemble, les véritables partisans pro-UE en Ukraine – ce qui
désigne les gens qui veulent vraiment adhérer à l’UE, sont prêts
à discuter pour savoir exactement pourquoi (à part sous forme de
simples « avoir de meilleures routes », etc.) –
représentent, peut-être, environ 15 % de la population, et le
même pourcentage de personnes peuvent être considérées comme
étant prorusses. La grande majorité de la population est
pro-Ukraine, et soutient tel ou tel parti politique non par rapport à
leur position en politique étrangère, mais pour ce que ce parti va
faire pour les salaires, les impôts, etc.
Pour
revenir à Maïdan, il y avait, bien sûr, de nombreuses factions
différentes présentes. Pour être plus exact, il y eut de
nombreuses factions différentes soutenant le Maïdan. Ianoukovitch
et ses oligarques étaient considérés comme antiukrainiens – des
personnes qui ont vendu le pays et ont attaqué les valeurs
fondamentales du pays également. Différentes forces s’opposaient
à cela.
En
Ukraine, les seuls groupes capables de rassembler facilement des
milliers de personnes pour des manifestations sont nationalistes. La
plupart des mouvements libéraux en Ukraine n’existent que par les
subventions étrangères et ne sont pas capables d’organiser des
protestations ; la plupart des mouvements russes n’existent
que sur papier. Dès le début, les nationalistes ont décidé de
soutenir sans réserve les manifestations contre Ianoukovitch. En
fait, concernant les captures des bâtiments gouvernementaux et les
combats contre la police, les nationalistes ont été clairement en
pointe. Dès le début, cela a donné à Maïdan une couleur très
nationaliste et traditionaliste.
Les
nationalistes ont distribué de nombreuses brochures et prononcé de
nombreux discours. Ils ont atteint un public qu’ils ne pouvaient
pas même imaginer avoir auparavant. Beaucoup de nationalistes
occidentaux, tels que Lauren Ozon
de France et John Morgan de Arktos
Publishing, ont également pris la parole et ont été
chaleureusement accueillis par les manifestants.
Dans
le même temps, les agents occidentaux en Ukraine ont vu ces
manifestations comme une excellente occasion de promouvoir
l’intégration à l’UE et l’UE en général. Ils ont tout
essayé pour transformer la haine simple de l’Ukrainien moyen en
amour pour l’Ouest et l’UE. Ils avaient les médiats derrière
eux, et pratiquement toutes les ressources en langue étrangère sur
les manifestations étaient éditées par eux. Malgré leurs efforts
colossaux, les nationalistes réussirent encore à donner à la
protestation une tonalité complètement ukrainocentrique.
Toute personne qui parle d’une
importante aide occidentale dans l’organisation des manifestations
vit tout simplement dans un monde imaginaire. Le Maïdan a été l’un
des meilleurs exemples d’auto-organisation de la population dans
l’histoire ukrainienne. Qu’il s’agisse des chauffeurs d’autobus
transportant gratuitement des gens depuis les provinces, des
dirigeants de sociétés de taille moyenne donnant de l’argent pour
maintenir le fonctionnement de la scène, des restaurants offrant des
repas gratuits pour les manifestants, l’ensemble des manifestations
était complètement organisé par la population. En grande
partie avec l’aide des nationalistes, il y avait des structures de
commandement verticales pour maintenir l’ordre. Des uniformes
spéciaux étaient distribués en fonction de la situation, que ce
soit sur la place centrale ou à l’intérieur des bâtiments. Les
manifestants étaient des gens ordinaires ; par exemple, un
grand nombre étaient des étudiants connus pour être les chefs des
mouvements nationalistes de jeunesse.
Il
convient également de mentionner que, bien que les protestations
eussent été centrées à Kiev, il y avait une certaine agitation à
la fois à l’Est et à l’Ouest contre le gouvernement.
Cependant, la grande majorité des gens estimait beaucoup plus utile
d’être transporté par autobus à Kiev que de protester en
province. Les manifestants venaient de partout dans le pays ; il
suffit de regarder l’origine des manifestants tués pour le
confirmer. Ce n’était pas un côté du pays contre l’autre, mais
les Ukrainiens de l’Est et de l’Ouest contre le
gouvernement.
L’atmosphère
sur le Maïdan n’en était pas moins populaire.
Il
suffit d’avoir été sur le Maïdan pour comprendre cela. Loin de
ce qui pourrait avoir été montré par la télévision occidentale
ou russe, au début et à la fin de chaque journée, les prêtres
orthodoxes étaient sur scène et récitaient des prières, répétées
par la foule ; des musiques et des films patriotiques étaient
diffusés en boucle ; la foule scandait des slogans
nationalistes après pratiquement chaque discours – un cri loin de
correspondre à l’antinationalisme promu par l’UE. Certes, des
slogans tels que « l’Ukraine est l’Europe » étaient
également présents, mais pour beaucoup ils avaient, eux aussi, des
nuances patriotiques et étaient compris non dans un sens
libéraliste, mais comme faisant partie de l’Europe, pas de l’URSS.
Bien
sûr, on pourrait dire que cela ne signifie rien, parce que ce ne
sont pas des prêtres nationalistes orthodoxes qui sont arrivés au
pouvoir. Pourtant, cela a changé la population inconsciemment, cela
a diffusé la compréhension non pas politique, mais ethnique
de la nation ; cela a même incité les libéraux à prétendre
qu’ils aimaient l’Ukraine et qu’ils voulaient construire
l’Ukraine pour les Ukrainiens. Le Maïdan a été une explosion de
la conscience civile qui unissait le patriotisme ukrainien avec des
demandes pour la justice économique et sociale.
Beaucoup
de nationalistes occidentaux ont vivement critiqué le Maïdan en
raison du fait que le néocon belliciste John McCain a parlé aux
manifestants. Cela était la preuve flagrante, selon certains, que
tout cela était une grande conspiration occidentale. Je dois dire
que, même pour moi, cela fut très désagréable de le voir sur le
Maïdan. Malheureusement, la néocon notoire Victoria
Nuland est également venue pour un jour ou deux.
Pourtant,
la moyenne des gens protestaient contre un gouvernement corrompu
contrôlé par la mafia et favorisant complètement les politiques
anti-chrétiennes et anti-nationales chez nous – un gouvernement
qui a vendu le pays aux sociétés et aux oligarques internationaux.
Les gens manifestaient pour une vie meilleure et un avenir meilleur.
Toute personne qui venait était soutenue par les manifestants – et
croyez-moi, il n’y avait pas de limites. En fait, la scène sur le
Maïdan était ouverte à quiconque voulait parler et ainsi des
milliers de gens ont parlé.
Alors
pourquoi McCain est-il venu et pourquoi a-t-il été bien reçu ?
Je voudrais modifier un peu la question. Je voudrais demander
pourquoi il n’y au que John McCain assez intelligent pour venir
soutenir le peuple ? Où était Marine Le Pen ? Où était
Nick Griffin ? Pourquoi ne sont-ils pas venus ? Pourquoi
aucun dissident occidental influent, dont beaucoup ont critiqué le
Maïdan, pour dire aux gens sur le Maïdan ce qu’ils pensaient ?
Même David Duke aurait pu venir et aurait été bien reçu. Je le
répète : pour l’ukrainien moyen, leur présence aurait été
vue non pas d’un point de vue idéologique, mais comme un soutien
véritable à un peuple opprimé se défendant contre un gouvernement
tyrannique – des personnes risquant tout. Pour être tout à
fait honnête, un membre du gouvernement russe aurait pu très bien
venir parler aux manifestants et aurait été bien reçu. En fait,
lorsque l’on prend en compte combien Ianoukovitch s’est opposé à
Gazprom, je ne sais pas très bien pourquoi ils ne l’ont pas fait.
Ils auraient massivement amélioré l’opinion qu’ont les
Ukrainiens de la Russie.
McCain
est probablement venu à cause de l’intelligence que
l’establishment américain possède malheureusement.
L’établissement américain savait qu’en envoyant quelqu’un de
très connu pour soutenir un peuple opprimé, ils pourraient
immédiatement influencer l’opinion publique en Amérique. Et c’est
ce qui s’est passé.
Bien
qu’à l’origine les gens considéraient la visite de McCain et
autres comme une manifestation de soutien, entre janvier et février
le soutien pour tout ce qui est occidental, y compris l’OTAN et
l’UE, s’est complètement effondré en Ukraine. Pour quelqu’un
d’aussi anti-OTAN et anti-UE que moi, c’était comme dans un
rêve, mais dans des circonstances horribles. Les
gens ne comprenaient pas pourquoi la réaction de l’Occident était
si faible.
De nombreux
sites anti-UE et des sites patriotiques antioccidentaux s’agitèrent,
et les citoyens lambda se moquaient des dirigeants politiques
occidentaux, de Barack Obama à
José
Manuel Baroso de tout leur cœur. C’était presque surréaliste
que même la plupart des médiats ukrainiens auparavant libéraux
rejoignaient le mouvement. Un rêve devenu réalité !
Imaginez
par vous-mêmes ce qui se passerait si, dans le centre de Damas,
500 000 personnes protestaient contre le gouvernement et que le
gouvernement répondait par des tirs comme sur des chiens ?
[9]
L’unité Berkut, qui, quelques mois plus tôt, frappait les
nationalistes et les chrétiens et défendaient les homosexuels,
tiraient cette fois sur les manifestants.
Bien
sûr, il y aurait immédiatement des sanctions paralysantes et la
communauté internationale appellerait à l’unisson le gouvernement
à démissionner. La réaction envers le gouvernement ukrainien a été
tout le contraire. Non seulement il n’y a eu aucune réelle
sanction imposée, et, même s’il y eut des appels à des
concessions politiques, personne n’appela Ianoukovitch à
démissionner, et de nombreux responsables occidentaux rappelèrent
que Ianoukovitch était le président légitime de l’Ukraine et
affirmèrent qu’il était celui qui devait conduire l’Ukraine
pendant la crise. Pourquoi tant de gouvernements occidentaux voient
Bachar al-Assad comme un président illégitime de la Syrie, comme un
criminel qui doit être renversé, mais n’était-ce pas le cas avec
Ianoukovitch ? Quelle est la différence ?
Comment
peut-on, après avoir compris cela, voir le renversement de
Ianoukovitch comme étant, même de loin, comparable au renversement
de Milosevic ou à la guerre contre Assad ?
Une
fois la révolution réussie, un avenir brillant sembla
se
dessiner : les nationalistes disposaient d’une énorme
quantité de soutien dans la société ; mais le plus important,
c’est que la société s’était mobilisée autour des
nationalistes. Les simples citoyens avaient appris à se battre et
voulaient se battre. Les slogans nationalistes s’unissaient
avec les exigences économiques et sociales dans une recette
classique que l’Europe a vue au cours de la première moitié du
XXe siècle. Des centaines de milliers de personnes en
colère manifestaient des attitudes anti-oligarque et en grande
partie anticapitalistes, combinées avec les sentiments
nationalistes. Et ils ont réussi à renverser le gouvernement. Ce
sont des gens qui ont perdu tout espoir et confiance dans tout ce qui
concernait l’UE ou l’OTAN.
Qu’aurions-nous
pu avoir de mieux ? Que se produise une révolution ? Sinon
une révolution, au moins la création en Ukraine d’une force de
type Hezbollah – un État dans l’État, fondé sur les valeurs
culturelles et avec le soutien de la masse, une force préparée pour
la résistance future contre l’état antinational ?
Tout
cela semble très possible. Pourtant, malheureusement, peu de temps
après, un événement s’est produit qui a tout changé.
III.
Le conflit avec la Russie
Du point de vue de
l’oligarchie mondiale et de toutes les forces qui répandent une
culture décadente à travers le monde, la Fédération de Russie
n’aurait pas pu choisir un meilleur moment pour lancer un conflit
avec l’Ukraine. Pour être tout à fait honnête, il est
difficile de penser à quelque chose qui serait plus efficace pour
transférer la charge de haine de la plupart des gens loin d’eux et
sauver parfaitement leur image en Ukraine.
L’agression a
commencé au moment où le gouvernement précédent tombait, avant
que le nouveau gouvernement n’arrive. Il s’agissait
essentiellement d’un moment d’anarchie, un moment où la foule
nationaliste, bien formée, dirigeait les choses dans la capitale, à
un moment où les postes de police principaux et les bases de l’armée
étaient occupés, quand un coup d’État
nationaliste complet était à portée de main.
Tout a commencé en
Crimée. C’est là que les troupes russes sont entrées en premier
dans le pays et ont renversé un gouvernement – dans ce cas,
elles ont mis au pouvoir le seul véritable mouvement prorusse de
Crimée, un mouvement qui, lors des précédentes élections en
Crimée, avait obtenu seulement 4 % des voix et n’avait jamais
mené une seule grande manifestation. Le « président »
et membre de ce mouvement, Sergei Askonov, s’est avéré être une
figure connue
du crime organisé en Ukraine, connu sous le nom du « Gnome »
dans le gang « Salem ».
La Crimée est une
région unique et très intéressante elle-même, et je vais essayer
de ne pas trop évoquer ce sujet. La région a voté dans le passé
pour faire partie de l’Ukraine dans un vote contrôlé et reconnu à
l’échelle internationale en 1991.
Elle est clairement,
historiquement, une région cosmopolite. Elle a été dirigée par de
nombreux pays, peuples et empires – y compris, à de
nombreuses occasions, les Ukrainiens. La région fut contrôlée par
les Grecs, bien qu’elle l’ait été le plus longtemps par
l’Empire ottoman. En fait, il n’existe aucune trace de vie russe
en Crimée jusqu’à XVIII
e siècle. En effet, dans le
premier recensement connu en Crimée, réalisé au XVI
e
siècle par l’explorateur turc
Evliya
Celebi,
les Ukrainiens sont déclarés être les « 4/5
e de
la population, la plupart comme esclaves », le reste étant des
Turcs et des Tatars.
Il est vrai que,
actuellement, les Russes sont majoritaires en Crimée, composant 58 %
de la population, tandis que les Ukrainiens forment 25 % de la
population et les Tatars 12 %. Il est également important de
comprendre que, depuis l’époque soviétique, beaucoup de gens
disent qu’ils sont Russes, alors qu’en réalité, ils sont
Ukrainiens ou même Tatars, surtout parmi les générations plus
âgées. En outre, la composition ethnique de la Crimée a
considérablement changé en raison de la politique de Staline,
faisant
des Russes une forte majorité à l’époque soviétique. Mais pour
être juste, on peut effectivement dire que la Russie possède des
droits sur la Crimée – droits, cependant, pas plus importants que
ceux de l’Ukraine, la Grèce ou la Turquie sur elle ; et une
revendication pas plus conséquente que celles de nombreux pays
européens pour des territoires hors de leurs frontières.
Il est vrai que la
Crimée a été transférée à l’Ukraine par l’Union soviétique
en 1954. Ce qui est bien peu mentionné, c’est que ce fut une
contrepartie directe aux terres ukrainiennes très fertiles de taille
égale à la Crimée, centrées autour de Taganrog (aujourd’hui
dans la région de Rostov en Russie), qui furent transférées de
l’Ukraine à la Russie. À l’époque, ces terres ukrainiennes
étaient un centre de vie ukrainienne et les Ukrainiens composaient
plus de 70 % de la population, et, historiquement, ces terres
avaie
nt toujours
fait partie de l’Ukraine. Cela a été réalisé parce qu’il a
semblé plus facile pour la République soviétique socialiste
d’Ukraine de développer la Crimée, qui était alors une région
sans industrie, sans agriculture et à peine habitée.
Cette annexion a été
un viol brutal du mémorandum de Budapest, que l’Ukraine a signé
avec les États-Unis, la Grande-Bretagne et la Russie, et qui
garantit la défense de la souveraineté
et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine en
échange de la remise par l’Ukraine de ce qui était alors le
troisième arsenal nucléaire dans le monde.
Le fait que les
États-Unis et la Grande-Bretagne n’ont absolument rien fait pour
arrêter de nouveau cette annexion a une nouvelle fois énervé
beaucoup de gens en Ukraine et a produit une forte baisse de leur
popularité dans l’opinion publique. Pourtant, malgré cela,
heureusement, pratiquement personne dans le monde n’a reconnu
l’annexion. Combiné à l’absence totale d’aide de la part de
ceux qui garantissaient d’aider l’Ukraine, il apparut de nouveau
que les choses pourraient prendre un tour positif – le fait
que nous étions complètement trahis par ceux qui dirigent les
États-Unis et la Grande-Bretagne a donné l’espoir que la grande
majorité de la population n’aurait plus confiance dans l’Ouest,
et soutiendrait une position de troisième voie, loin de la Russie et
de l’Occident (en fait, même d’anciens politiciens libéraux ont
fait de nombreuses déclarations allusives en ce sens) ; et le
fait que nous ayons renoncé à l’arme nucléaire pour rien a
conduit à de nombreuses discussions sérieuses sur la reconstruction
complète de l’armée ukrainienne – cela a redonné à la nation
une idée nationale, quelque chose autour de quoi s’unir. Les gens
ont même sérieusement évoqué la destruction de tout le présent
corrompu pour tout reconstruire. Nous souhaitons faire l’union
autour de la reconstruction du pays et, éventuellement, reprendre
notre chère Crimée – soit par la force soit par une guerre par
procuration. Nous ne pouvions plus compter sur l’Occident,
seulement sur nous-mêmes.
Par une étrange
coïncidence, l’annexion de la Crimée par la Russie a rendu les
Ukrainiens plus nationalistes, plus opposés à l’Occident libéral,
et plus unis.
Un pays nationaliste,
indépendant et profondément insulté naissant dans le centre de
l’Europe ? Quel cauchemar pour l’oligarchie mondiale et ces
personnes identiques qui dirigent la Grande-Bretagne et les
États-Unis ! La Fédération de Russie semblait d’accord, et
encore, comme si elle en avait reçu l’ordre, faisait tout pour
sauver l’image de ceux qui dirigent l’Occident et éloigner la
haine loin d’eux.
À la mi-avril, avec
une synchronisation quasi-parfaite pour sauver l’image de
l’Occident, la Fédération de Russie a commencé à envoyer des
mercenaires dans l’est de l’Ukraine.
Ne vous méprenez pas : le conflit dans l’est de l’Ukraine
n’est pas différent du conflit en Syrie. La grande majorité des
soi-disant « séparatistes » ne sont pas des locaux et
pratiquement aucun ne parle pas l’ukrainien ; ils parlent même
le russe de Russie, sans accent ukrainien.
Il y a même eu de
nombreuses preuves humoristiques de cela : par exemple, à
Kharkiv,
ils
ont attaqué
un opéra, exigeant que le maire en sorte, pensant que c’était
l’hôtel de ville. Ils ont des armes sophistiquées qui ne peuvent
être obtenues qu’à l’étranger.
Il
est certainement vrai que, comme en Syrie, les terroristes sont
soutenus par une partie de la population locale. En Ukraine, ils ont
le soutien d’une grande partie de la minorité ethnique russe
(atteignant dans certains cas 30 %), et en Syrie, ils ont à peu
près la même proportion de soutien de la population sunnite local.
Pourtant,
c’est toujours une petite minorité, même dans l’est de
l’Ukraine. En réalité, en dehors de quelques régions, l’est de
l’Ukraine demeure aussi paisible que l’Ukraine occidentale ;
et peut-être même plus pacifique.
[10]
Points de troubles dans l’Est de l’Ukraine en rouge. La grande
majorité de la région n’a été épargnée par aucune violence.
Il
est important d’examiner les politiques de la Fédération de
Russie à l’intérieur de l’Ukraine qui ont conduit à cela. Il
semble exister une certaine idée fausse qu’en Ukraine, la Russie
combat le libéralisme, la mondialisation, etc., tandis que toutes
les autres forces d’Ukraine s’en rapprocheraient.
Malheureusement, la Fédération de Russie en Ukraine ne combat que
les partisans de l’identité ukrainienne, laissant les agents
occidentaux intacts. Lorsque la première ‘gay pride’ a eu lieu à
Kiev, la première tentative en mai 2012 et ensuite tenue en 2013
– deux fois validée par ce même gouvernement que la
Fédération de Russie reconnaît toujours comme le gouvernement
légitime de l’Ukraine à ce jour et qui a donné des millions de
dollars pour la soutenir – ce sont des nationalistes
ukrainiens qui se sont mobilisés et l’ont attaquée. Et ce sont
des chaînes de médiats prorusses à l’époque, comme Inter, qui
ont le plus fortement critiqué les « fascistes ukrainiens »
pour leurs actes.
Il
y a quelque temps, lorsque l’Université de Kiev-Mohyla a essayé
d’héberger, presque littéralement, une exposition d’art libéral
complètement dégénéré – la première du genre en
Ukraine – avec des attaques contre la famille, le
christianisme et le cœur de l’identité ukrainienne, ce sont les
nationalistes ukrainiens qui ont attaqué l’exposition, l’ont
détruite, et ont même rencontré le chef de l’université et
finalement réussi à interdire le groupe qui la soutenait. Ils ont
été traités ensuite de « néonazis », « fascistes »,
etc. par des groupes médiatiques parrainés par la Russie.
Des politiciens comme
l’oligarque juif Mykhailo Dobkin, ou Vadim Kolesnichenko – tous
les deux ouvertement parrainés par la Russie – soutiennent sans
réserve tout ce qui a trait avec l’Union européenne quand il
s’agit d’attaquer l’identité ukrainienne. Un excellent exemple
en est la soi-disant « loi sur les langues régionales »,
qui serait essentiellement comme faire de l’arabe une langue
régionale à Londres ou à Paris (ce qui signifie que la loi
permettrait d’ajouter l’arabe à tous les panneaux de
signalisation routière, d’avoir un temps de parole égal à la
télévision et à la radio, etc.). Un autre est la loi qui a décidé
la reconnaissance officielle par l’État des dissidents de
l’Ukraine soviétique des années 1970 comme des héros, avec les
partisans nationalistes anti-soviétiques. La loi sur la langue a été
justifiée comme étant un exemple de «
la
défense des minorités, comme nous devons le faire, car nous voulons
adhérer à l’UE »,
tandis que la seconde loi a été justifiée simplement parce que
«
c’est notre responsabilité devant l’UE, et nous
voulons y adhérer ».
Durant l’automne
2013, des nationalistes ukrainiens déployèrent une croix celtique
et un drapeau nationaliste ukrainien durant un match de football.
Personne dans les tribunes ne s’en préoccupa ; en fait, les
« ultras » qui ont amené ces symboles étaient appréciés
par les autres supporteurs. Ce n’était pas un problème important
en Ukraine, parce que tous les supporteurs de football en Ukraine
sont nationalistes, sauf un (aujourd’hui disparu, depuis l’hiver
2013) : le FC Arsenal Kyiv, qui se considère comme antifasciste. Ce
groupe, dont les supporteurs antifascistes étaient et sont contrôlés
par des dirigeants directement financés par la Fédération de
Russie, était réputé particulièrement pour ses attaques contre
des gens innocents portant des symboles patriotiques sur eux ou pour
défendre les manifestations des homosexuels.
Pourtant, après le
match, leur chef, membre d’un syndicat « antifasciste »
en Ukraine financé par la Fédération de Russie –
également
membre de la commission de l’UEFA prétendument
« anti-raciste » et « anti-homophobe »
appelée FARE –
dénonça
immédiatement
à l’UEFA les « fascistes ukrainiens ». Un scandale
international s’ensuivit, et l’Ukraine eut l’interdiction
d’avoir des supporteurs lors de son match suivant à domicile.
Alors que la lutte
contre les « fascistes ukrainiens » patriotes profamilles
à l’intérieur de l’Ukraine est fortement financée par le
Kremlin, le marxisme culturel venant de l’Ouest est totalement
épargné par le même Kremlin. Seuls les nationalistes ukrainiens
s’opposent ouvertement aux fonds occidentaux, aux ambassades et aux
subventions en Ukraine qui visent à diffuser toutes les valeurs qui
ont détruit l’Occident. Seuls les mouvements nationalistes
ukrainiens font ouvertement des déclarations contre eux et les
combattent ouvertement dans les rues.
L’ambassade de
Russie, qui s’engage activement dans une guerre informationnelle
contre les nationalistes ukrainiens, en disant qu’ils sont
« dangereux pour la société » – n’a jamais
émis une seule déclaration sur la dangerosité de ces fonds
occidentaux, des ambassades et des subventions en Ukraine. Ils n’ont
jamais été contrés, même légèrement, par la Fédération de
Russie en Ukraine, et, en fait, quand il s’agit de stopper
l’« héroïsation du nazisme » en Ukraine, la
Fédération de Russie travaille activement avec ces fonds
occidentaux, ces ambassades et ces subventions.
La première
manifestation du Mouvement des jeunes Eurasiens
financés par la Russie en Ukraine l’a discrédité dans les
esprits de pratiquement tous les Ukrainiens. On pourrait penser qu’un
mouvement qui prétend combattre le libéralisme mondial voudrait, à
tout le moins, détruire le bureau d’un fonds libéraliste parrainé
par George Soros en Ukraine, ou, au moins, diffuser des tracts
antilibéraux.
Au lieu de cela, ils
ont grimpé sur le plus haut sommet d’Ukraine, la montagne Hoverla,
où ils ont détruit des traces du nazisme omnipotent – cette fois,
le symbole de l’État de l’Ukraine, le « Tryzub »
(que, bien sûr, ils appellent un «
symbole du nazisme »),
et aussi une copie de la première Constitution d’Ukraine. Non
seulement ils ont fait cela, mais ils ont également
rebaptisé
la montagne de Hoverla en « Montagne de Staline » durant
ces faits.
Comment l’ambassadeur
russe a-t-il réagi ? «
Ce
n’est pas grave,
c’était juste une mauvaise blague. » Vraiment ?
Peu de temps après, la
branche israélienne du Mouvement des jeunes eurasiens a déchiré un
drapeau ukrainien à Tel Aviv pour protester contre « le
nazisme ukrainien ». La manifestation était conduite par
Avigdor Eskin, un sioniste israélien et bon ami d’Alexandre
Douguine.
[11]
Les sionistes eurasistes combattent le nazisme ukrainien à
Tel-Aviv.
Il convient de
mentionner, toutefois, que malgré ces politiques, les Ukrainiens
considèrent les Russes très positivement. Cela n’est pas moins
vrai dans le soi-disant «
cœur du nazisme
ukrainien », l’Ukraine occidentale. En effet, dans des
dizaines de grandes villes d’Ukraine occidentale, on peut trouver
des monuments d’écrivains russes comme Pouchkine ; la ville
de Lviv, au début de 2014, organisa «
Parler
russe un jour » pour montrer qu’il n’existe aucune
animosité vis-à-vis de la Russie. Ceux qui ne parlent pas
l’ukrainien ne peuvent que vérifier les réactions chaleureuses et
accueillantes des habitants traditionnels de Lviv, le soi-disant cœur
du nazisme ukrainien, lorsque demandèrent où trouver l’Église
orthodoxe russe locale, en russe, des personnes prétendant venir de
Moscou enregistrées en caméra cachée (
voir
ici).
L’une des principales
et plus grandes organisations nationalistes du mouvement Secteur
droit (un front uni des mouvements nationalistes créés au cours des
manifestations de Maïdan), les Patriotes d’Ukraine, ont même
proposé
que l’Ukraine nationaliste forme une confédération avec la Russie
nationaliste et la Biélorussie il y a quelques années, lors d’une
réunion avec les nationalistes russes à Kiev.
La seule chose que le
Kremlin actuel déteste peut-être autant que les Ukrainiens sont les
Russes ethniques. Les Russes ethniques ont été chassés de la
région du Caucase, ainsi que de Moscou. Il y a seulement quelques
semaines, à la mi-mai, des émeutes de nationalistes russes contre
l’immigration de masse ont éclaté dans la ville de Pushkine
après qu’un fan de football russe eut été assassiné par un
immigré arménien. Les manifestants ont été réprimés durement
par la police et il y eut un silence total dans les médias russes.
Tout naturellement, les eurasistes (les partisans de Douguine)
prétendent que rien ne s’est passé.
[12]
Les nationalistes ukrainiens dénoncent les mauvais traitements
subis par les Russes ethniques dans la Fédération de Russie devant
l’ambassade de Russie à Lviv, Ouest de l’Ukraine.
Les crimes contre les
Russes ethniques commis par des immigrés de la région du Caucase
sont très communs ces dernières années dans la Fédération de
Russie. La dernière explosion nationaliste majeure à l’intérieur
de la Fédération de Russie s’est déroulée en décembre 2010,
quand, déjà,
un jeune supporteur de football avait été
poignardé par un immigré
– qui fut peu de temps après blanchi
et libéré par la police. Les nationalistes ukrainiens
avaient
immédiatement réagi
en procédant à de nombreux rassemblements de solidarité avec leurs
frères russes réprimés.
Bien sûr, la
Fédération de Russie est elle-même un État multinational et,
donc, il n’est pas logique d’essayer de construire une société
totalement homogène à l’intérieur de la Russie. Pourtant, à
l’intérieur de la Fédération de Russie toute forme et tout sens
de l’identité ethnique russe sont complètement découragés et
immédiatement attaqués ; et, malgré les différentes
nationalités originaires de Russie, il est tout à fait possible de
former une identité nationale autour des Russes ethniques, de
l’identité slave – comme cela a été fait dans le passé. Mais
cela n’est pas fait et tous ceux qui veulent le faire sont attaqués
par l’établissement comme à l’Ouest.
Ce qui est encore pire,
c’est que maintenant l’afflux de migrants provient de pays en
dehors de l’ex-Union soviétique, tels que les pays africains, la
Chine et ainsi de suite. Celui qui pense Paris est multiculturel n’a
pas été à Moscou. Aujourd’hui, dans la Fédération de Russie,
un peu comme à l’Ouest avec les Blancs, si deux personnes se
battent – un Russe ethnique et un non-slave – ce sera toujours le
Russe ethnique qui sera attaqué et dénoncé par les médiats. De
nombreux exemples de ce type existent. Précisément, la Fédération
de Russie moderne a même créé un nouveau mot qui se traduit en
français par « Russe » pour décrire les nationalités –
le mot traditionnel Russky, a été entièrement remplacé
dans tous les médiats d’État par le faux mot Rossiyanyn
qui désigne toute personne vivant en Russie, indépendamment de la
nationalité ou du lieu de naissance. Inutile de dire que
pratiquement tous les discours de politiciens russes interprétés
comme étant nationalistes par des dissidents occidentaux utilisent
le mot Rossiyanyn, qui
possède une connotation très
négative, anti-nationaliste et non Russky.
Sans aucun doute
possible, les Russes ethniques sont beaucoup mieux traités en
Ukraine que dans la Fédération de Russie.
Poursuivant leur
tradition de promotion de relations amicales avec les Russkys,
les nationalistes ukrainiens au cours des récentes manifestations en
Ukraine ont même créé des légions spéciales russes. Ainsi, le
Secteur droit a créé un bataillon spécial pour les camarades de
Russie venus rejoindre
et défendre l’Ukraine slave ; il
est devenu très populaire et très actif.
Les nationalistes
indépendants ont également créé un comité spécial à Maïdan
nommé RUNA (qui signifie « Rune » en ukrainien et en
russe, et veut dire Association nationaliste russo-ukrainienne) qui
vise à faciliter la coopération.
Bien avant que les
événements actuels ne commencent, un membre d’origine russe et
dirigeant régional du parti nationaliste ukrainien Svoboda l’a dit
parfaitement : « Vous ne trouverez pas un seul Russe
ethnique parmi les leaders des mouvements russes financés par
le Kremlin en Ukraine » – des mots très
intéressants et pertinents.
Toutes les forces
prorusses en Ukraine sont financées par la Fédération de Russie –
via les millionnaires juifs comme Mykailo Dobkin, aux partis
politiques unis autour de la criminalité organisée, comme l’ancien
Parti des régions. Idéologiquement, ces groupes sont libéraux et
(étonnamment, peut-être), ils sont pro-UE – par exemple, le Parti
des Régions a signé de nombreuses lois nécessaires pour se
rapprocher de l’UE avant de soutenir l’accord d’association,
que le gouvernement actuel a également soutenu et a obtenu beaucoup
d’argent en provenance de Russie ; la même chose se passe
pour les groupes « antifascistes ». Ils souhaitent
simplement qu’il y ait moins de présence de la langue ukrainienne
et d’identité ukrainienne en Ukraine. Une ‘gay pride’ :
pas de problème, tant que les pancartes sont écrites en russe. Leur
ennemi ne sont pas les libéraux ukrainiens, ni les agents
occidentaux, etc. : leurs ennemis sont les nationalistes
ukrainiens.
IV.
La Russie comme puissance mondialiste, libérale, anti-ethnique
Pourquoi la Fédération
de Russie favorise-t-elle et défend-elle tant le libéralisme
occidental en Ukraine ? La réponse peut être trouvée en
examinant la Russie moderne en tant que pays.
La Fédération de
Russie est, dans son essence, un État libéral. Il s’agit d’une
démocratie libérale typique qui, à bien des égards, diffère peu
des pays d’Europe occidentale. C’est un pays qui attaque la
culture de ses peuples fondateurs ; un pays où les jeunes se
moquent des traditions de leurs ancêtres ; un pays où MTV
maîtrise les ondes et où McDonald’s est la destination la plus
populaire pour ceux qui cherchent à dîner à l’extérieur (ainsi,
le plus grand McDonald’s en Europe est à Moscou) ; un pays
qui se définit comme un projet national avec une lecture politique –
et non pas ethnique – de la nation («
n’importe
qui étant citoyen est russe »); un pays qui, au
niveau de l’État, travaille en étroite collaboration avec le FMI
et les Nations unies ; un pays qui, même,
aide
les forces américaines et l’OTAN en Afghanistan ; un pays où
les musiciens les plus populaires, en plus des artistes occidentaux
comme Madonna ou Lady Gaga, sont des dégénérés ethniquement non
russes comme
Filipp
Kirkorov
et le rappeur
Timati
– selon exactement le modèle utilisé par les médiats
mondialistes pour laver le cerveau des jeunes du monde entier pour
oublier leur patrimoine et leurs traditions ethniques ; un pays
où le président tchétchène
Ramzan
Kadyrov
– dont le père a combattu activement contre les forces russes et
est responsable de l’éradication des Russes de Tchétchénie – est
officiellement un héros de l’État.
En fait, la seule et
unique chose qui différencie la Fédération de Russie de l’Europe
occidentale – et l’une des seules choses qui donne aux dissidents
occidentaux des illusions – c’est la façon dont elle interdit la
propagande LGBT. Pourtant, cela a été grossièrement mal
interprété. Il s’agit d’une grande loi, bien sûr, mais elle a
été adoptée malgré une résistance énorme, même au sein du
parti au pouvoir et dans les médiats progouvernementaux.
Essentiellement, elle ne fait qu’interdire les parades
d’homosexuels (ce qui est, en soi, une bonne initiative bien
entendu). Pourtant, la propagande pro-LGBT est de plus en plus
présente dans tous les médiats, et les clubs de pédérastes se
multiplient.
Lorsque l’on regarde
de tels cas, on oublie que l’idéologie destructrice du libéralisme
telle qu’elle est actuellement définie à l’Ouest est apparue
dans la Fédération de Russie bien plus tard qu’à l’Ouest. En
ce sens, la situation de la Russie d’aujourd’hui, par
rapport au mouvement LGBT, est celle d’il y a
40 ou 30 ans à l’Ouest. Interdire
la propagande homosexuelle n’est qu’un compromis – une tactique
de l’élite dirigeante satisfaire les millions de musulmans en
Russie et les millions de personnes de l’ancienne génération qui
ont grandi en Union soviétique où l’homosexualité était une
infraction pénale. Si l’élite de la Fédération de Russie était
vraiment sincère à ce sujet, elle pourrait faire beaucoup plus
qu’essentiellement n’interdire que les défilés des homosexuels
pendant un certain temps, sans toucher à l’immense présence de la
propagande LGBT dans les médiats. Mais elle ne fait pas.
[13]
À peine mieux que Conchita ou Lady Gaga : le show-business
russe moderne.
En fait, le régime
actuellement au pouvoir dans la Fédération de Russie a pratiquement
complètement détruit toute opposition prorusse authentique :
loin d’être des clowns néonazis, les véritables opposants russes
nationalistes et orthodoxes, anti-sionistes, comme le
général
Vladimir
Kvachkov
– un ancien colonel des
spetsnaz
(forces spéciales) et haut cadre de l’armée russe qui a été
impliqué dans une tentative d’assassinat sur l’oligarque juif et
rentier des privatisaions Anatoly Chubays – ont été complètement
humiliés, détruits et jetés en prison.
Outre le gouvernement
actuel de la Fédération de Russie, il existe une opposition
« légale », parmi lesquels il y a un grand nombre
d’agents occidentaux déclarés (ouvertement) qui sont tous
ultralibéraux – comme Mikhaïl Prokhorov (milliardaire
d’origine
juive
qui possède les Nets de Brooklyn, une équipe de basket-ball
professionnel américain) ou des partis tels que
Iabloko.
Ils ne sont pas embêtés et sont autorisés à fonctionner
ouvertement et disposent d’énormes temps d’antenne. Grâce à
Gazprom, l’État russe finance même la station de radio
Écho
de Moscou
– une station de radio ultralibérale, antichrétienne et
promondialiste qui est très populaire en Russie et agit comme la
principale source d’informations de l’opposition
légale.
Le visage de la
Fédération de Russie pour les dissidents de l’Ouest, le mouvement
eurasiste d’Alexandre Douguine (qui aime promouvoir sa propre
version de l’intégration eurasienne sur la base d’un modèle
multiculturel comme seule version valable) existe essentiellement sur
l’Internet à l’intérieur de la Fédération de Russie. On ne
trouve trace d’aucun rassemblement mené par ce mouvement à
l’intérieur de la Fédération de Russie avec plus de quelques
centaines de personnes (et même autant, c’est extrêmement rare,
en fait, la plupart des rassemblements de ce mouvement ne mobilisent
guère que quelques dizaines de personnes). À l’inverse des
rassemblements libéraux réunissent régulièrement des milliers de
personnes dans n’importe quelle ville. L’écrasante majorité des
gens dans la Fédération de Russie n’ont même jamais entendu le
nom d’Alexandre Douguine, ni aucune de ses théories.
Oui, Alexandre Douguine
prétend être proche du gouvernement. Mais beaucoup plus près et
beaucoup plus influents sont les ultralibéraux et ultracapitalistes
mondialistes – des personnalités comme
Mykhail
Fradkov
ou
Anatoliy
Chubays,
parmi de nombreux autres. Essentiellement, à l’intérieur de la
Fédération de Russie, la rhétorique d’Alexandre Douguine pour
les patriotes russes est : «
ne vous inquiétez pas, ne
créez pas vos propres mouvements. Ayez simplement confiance dans le
gouvernement russe ».
Par ailleurs, Chubays,
qui contrairement à Fradkov
n’a
pas revendiqué
ouvertement
ses racines juives, a été au pouvoir dans la Fédération de Russie
quasiment depuis 1991. Il fut une figure majeure de la privatisation
de l’économie russe qui a transféré la richesse de la Russie à
quelques oligarques, principalement juifs ; il a occupé
plusieurs postes, à la fois au sein du gouvernement et en tant que
propriétaire de sociétés étatiques russes. Récemment, il a été
nommé par Poutine à la tête d’une entreprise de
nanotechnologie
créée et possédée par le gouvernement russe.
Il est un membre
actif de l’ultra-mondialiste Club Bilderberg (voir aussi
ici).
Voir la Fédération de
Russie moderne comme un État dirigé par Alexandre Douguine serait
comme voir les États-Unis actuels comme un État dirigé par David
Duke.
Le « conservatisme »
de la Fédération de Russie moderne n’existe que grâce à un
trait assez traditionnel de la Russie : les tendances sociales
en Russie n’apparaissent que peu de temps après être nées à
l’Ouest. Par exemple, c’est ce qui s’est passé avec
l’utilisation de la langue française dans les cours d’Europe et
ensuite en Russie (où elle a mis plus de temps à disparaître). Un
autre exemple est que le pouvoir juif a pris naissance en Europe
occidentale et a été combattu en Russie jusqu’à la révolution
bolchevique. On pourrait aussi parler du déclin du servage et de
l’aristocratie héréditaire survenant d’abord à l’ouest puis
s’étendant vers l’est.
La Russie
d’aujourd’hui est l’Ouest d’il y a 30 ans. Exactement les
mêmes processus sont en cours et exactement la même rhétorique est
utilisée. Il n’y a absolument aucune raison de croire que la
Russie différera de l’Ouest dans 30 ans. La Russie ne devrait pas
être présentée comme une lueur d’espoir pour les nationalistes
de l’Ouest.
Il est important de
comprendre que dans le monde globalisé actuel, les conflits
géopolitiques signifient très peu pour déterminer comment est
contrôlé tel ou tel pays par l’oligarchie mondiale. Par exemple,
la France de Chirac a connu de nombreux conflits avec les États-Unis
– à tel point qu’à l’intérieur des États-Unis, de nombreux
« patriotes » ont appelé à boycotter les « frites »
[french fries] comme moyen de montrer leur mécontentement contre la
France. Il s’agissait d’établissements « patriotes »
qui ressemblent à bien des égards à la mise en place dans des
établissements eurasistes « patriotes » dans la
Fédération de Russie qui font tout pour qu’il y ait une guerre
totale avec l’Ukraine. Dans de nombreux cas, ces conflits
géopolitiques à l’Ouest ne représentaient rien, comme c’est le
cas aujourd’hui pour la Fédération de Russie. Est-ce à dire que
tous les nationalistes auraient dû cesser de construire leurs
propres mouvements indépendants pour s’unir autour de la France et
chanter des odes à Chirac ?
Ce qui est beaucoup
plus important, c’est le système à l’intérieur de chaque
pays ; les « métapolitiques » qui conduisent chaque
pays – qui contrôlent les questions qui sont autorisées au débat.
Ce qui est véritablement critique, ce sont les élites
financières
et
médiatiques
et leurs positions idéologiques et visions du monde. Par exemple, la
République islamique d’Iran est considérée par tous les médias
occidentaux comme un ennemi juré non pas pour des raisons
géopolitiques – en fait, elle n’est pas du tout en mesure de
contester la géopolitique occidentale. Elle est considérée comme
l’ennemi non seulement en raison de son hostilité à Israël, mais
parce qu’elle est gouvernée avec un système alternatif complet
par rapport à l’Ouest – non pas une démocratie libérale, mais
une démocratie islamique ou, dans un sens, une théocratie.
Les questions débattues
en Iran et en Occident sont donc complètement différentes parce que
les élites financières, médiatiques et autres ont des visions du
monde complètement différentes. (Il n’y a aucun moyen de
communication en Iran qui ressemble aux médiats occidentaux, et en
général les « projets » qui fonctionnent en Iran et en
Occident ont des objectifs complètement différents pour l’avenir
du monde).
Comme décrit
ci-dessus, le fait est que pour la Fédération de Russie cela
diffère généralement peu de l’Ouest. Les élites de l’Ouest et
les élites de la Fédération de Russie sont en grande partie le
même – tant et si bien, que la fille de Poutine, les enfants du
chef des services secrets de la Russie, et les enfants de ministre
des Affaires étrangères de la Russie vivent
tous
à l’Ouest ;
tant et si bien que des milliards de dollars contrôlés par les
élites « russes »
sont
planqués en toute sécurité
dans les banques occidentales et surtout américaines.
Quand Saddam Hussein a
attaqué le Koweït, l’ensemble de la « communauté
internationale »© s’est rassemblé contre lui. C’est parce
que Saddam Hussein avait construit un système national relativement
indépendant en Irak, sur la base de l’identité nationale arabe et
contraire à l’identité du consumérisme mondial. Lorsque la
Fédération de Russie a annexé la Crimée et a commencé à envoyer
des mercenaires en Ukraine orientale, les pays occidentaux ont
répondu par le gel des comptes bancaires des ministres russes dans
leur pays.
*
**
La seule forme de
« patriotisme » actuellement autorisée dans la
Fédération de Russie est une haine farouche pour tout ce qui est
ukrainien, sous le couvert de « l’antifascisme ».
L’Ukraine, en tant qu’État uni religieusement (plus de 90 %
de chrétiens orientaux) et homogène (plus de 80 %
d’Ukrainiens, environ 97 % de Slaves) est une menace directe
potentielle pour le projet en cours mené dans la Fédération de
Russie. (La Biélorussie est également une menace potentielle, pour
des
raisons similaires).
La guerre en Ukraine et le « patriotisme » dans la
Fédération de Russie ressemblent fortement au « patriotisme »
qu’on pourrait trouver en Amérique en ce qui concerne les
horribles guerres en Irak ou en Afghanistan – ou potentiellement
dans une guerre contre l’Iran. Les patriotes russes demandent
pourquoi les Russes ethniques devraient être défendus en Ukraine,
où ils ne sont pas traités plus mal que les Ukrainiens ethniques
– mais pas à Moscou, dans la région du Caucase, ou à
l’Extrême-Orient de la Fédération de Russie où ils sont
clairement remplacés ?
[14]
à gauche : Pierre Narcisse et sa femme. À droite, Pierre
Narcisse durant l’émission.
Le patriotisme de
l’establishment dans la Russie moderne a été bien représenté
par Pierre Narcisse, un artiste africain populaire en Russie, lors
d’une récente
émission
de débat sur les événements en Ukraine.
En agitant un drapeau russe, il dit : « Je suis du
Cameroun, mais ma femme est russe. Mes enfants seront Russes… La
Russie va être mise à genoux » – après quoi le public a
applaudi bruyamment. Peu de temps après, bien sûr, il a réalisé
qu’il avait fait un lapsus et s’est corrigé : «
Je
voulais dire l’Amérique sera mise à genoux ».
Le problème avec ce
type de pseudo anti-américanisme est que ce type de patriotisme de
l’establishment n’est pas une menace pour l’Amérique –
essentiellement, c’est comme une version miroir de l’Amérique,
l’Amérique allégée, l’Amérique il y a 30 ans,
l’Amérique
2.0.
Seuls les États avec de véritables systèmes alternatifs souffrent
de conflits de longue durée.
En Crimée
actuellement, les habitants signalent un énorme afflux d’immigrants
en provenance d’Asie centrale, en particulier sur les marchés.
Ceci est
activement
soutenu et encouragé
par le gouvernement russe. Cette région, autrefois homogène (même
si de nombreux Tatars de Crimée ont été fortement assimilés par
les Slaves) est en train de devenir son propre paradis multiculturel.
Bien sûr, cependant, cela est chaleureusement accueilli par
l’establishment russe parce cela vaincra le « fascisme »
et le « néonazisme ». Les plus grandes menaces étaient
les facultés ukrainiennes des deux principales universités, qui ont
été immédiatement fermées après l’annexion, et le monument du
roi ukrainien Petro Sahaidachny qui a été immédiatement mis à
bas ; ceci s’est produit peu de temps après que les symboles
nationaux ukrainiens aient été retirés de tous les bâtiments
administratifs.
Géopolitiquement, la
fonction de la Fédération de Russie moderne est de pousser les
États indépendants vers l’Ouest. La Fédération de Russie et
l’Occident sont des alliés absolus. Aucune force ne discrédite
l’idée de l’indépendance nationale dans des pays comme
l’Ukraine, la Géorgie, ou même la Finlande plus que la Fédération
de Russie. La Fédération de Russie ne fait absolument rien dans
aucun de ces pays pour lutter contre la propagande pro-UE, pro-OTAN
propagée par l’Occident à travers les médiats – que ce soit
par des conférences ou simplement des publicités à la télévision.
Bien au contraire, en
fait. Leurs actions servent de raison directe dans beaucoup de ces
pays pour soutenir l’adhésion à l’UE et l’OTAN. Ils agissent
uniquement lorsque l’opinion publique se détourne de l’idée de
rejoindre ces blocs et leurs actions poussent à nouveau l’opinion
publique en leur faveur. La Russie n’est perdante en aucune manière
dans les conflits dans ces pays à l’Ouest – elle travaille avec
l’Occident pour pousser ces pays à se rapprocher de l’Occident.
En effet, ce n’est
pas pour rien si l’un des nationalistes occidentaux les plus
influents et l’une des importantes figures parmi les nationalistes
occidentaux, le fondateur du mouvement Troisième Position
Gabriele
Adinolfi
a dit
assez
clairement :
«
L’Eurasie est une utopie. Moscou et Washington sont les
héritiers de Yalta ». Pour lui, la Maison-Blanche et le
Kremlin ne font simplement que «
poursuivre
leurs propres intérêts en Ukraine », comme ils l’ont
fait plus tôt à Yalta, et «
mettent en œuvre
la stratégie de (fausse) tension »
activement. Pour lui, le conflit est simplement une «
poursuite
du conflit entre les trotskistes (Soros) et néo-staliniens
(Poutine) ». Il poursuit : « Moscou –
important artisan de l’OMC et du FMI, ainsi que de la
mondialisation des entreprises énergétiques ; Moscou, le même
Moscou qui travaille activement avec l’OTAN dans sa “guerre
contre le terrorisme” – Moscou n’est pas
antimondialiste ». M. Adinolfi soutient lui-même activement
les nationalistes ukrainiens concernant l’invasion russe.
V.
Le conflit dans l’Est de l’Ukraine
Pour revenir sur les
événements dans quelques (sur plus d’une douzaine)
régions de l’est de l’Ukraine, il y a une idée chez beaucoup
d’Ukrainiens selon laquelle, en ce qui concerne l’Ukraine, le
Kremlin est esclave de sa propre propagande. Il crée ses propres
mythes et ces mythes agissent dans la vie réelle, comme s’ils
s’approchaient de la réalité. Un des plus grands mythes que le
Kremlin est parvenu à créer est que parler russe en Ukraine, c’est
avoir plus de loyauté envers la Fédération de Russie que
l’Ukraine.
[15]
Des manifestants pro-russes masqués se préparent à l’assaut
contre le bureau du procureur militaire à Donetsk, en Ukraine
orientale, le dimanche 4 mai 2014.
C’est pourquoi les mercenaires russes ont reçu si peu de soutien
de la population locale dans l’est de l’Ukraine. Même le
commandant des mercenaires russes dans l’est de l’Ukraine
(lui-même citoyen de la Fédération de Russie)
a
déclaré
clairement lors d’un discours posté sur YouTube que dans
l’ensemble, aucun habitant ne rejoignait ses rangs pour «
combattre
les nationalistes ukrainiens » (pourquoi pas les
Ukrainiens
libéraux ?) – malgré la fourniture d’argent et
d’armes modernes. En fait, il a déclaré que «
ceux qui
rejoignent nos rangs habituellement viennent
juste récupérer des armes, prennent un peu d’argent et
rentrent ensuite chez eux pour voler les magasins. Nous
offrons aux gens la possibilité de lutter contre les nationalistes
ukrainiens, mais ils préfèrent rester à la maison et boire de la
bière ».
L’Ukraine
orientale est en général la région la plus libérale de l’Ukraine,
et la région du Donbass – la seule région de l’est de
l’Ukraine, où des mercenaires financés par les Russes n’ont pas
encore été chassés – est de loin la région la plus
libérale du pays. Avant ces événements, le chef du Donbass, qui
soutient actuellement les mercenaires russes, a même déclaré
qu’«
une parade gay aura lieu pacifiquement dans notre
région ». (D’ailleurs, je déteste utiliser constamment
les homosexuels comme exemple, mais le mouvement homosexuel moderne
organisé est tout simplement un symbole de la domination des élites
libérales dans les sociétés occidentales hostiles aux populations,
cultures et identités ethniques traditionnelles de tous les peuples
européens.) En fait, comme d’habitude,
seuls
les nationalistes (et aussi les membres des Églises)
ont protesté contre l’éventualité d’un défilé à Donetsk.
Aucun des mouvements « antioccidentaux » actuels n’a
été vu, pas plus qu’aucun des militants de la « République
populaire de Donetsk ».
Les
autorités locales de la région, dont la plupart soutiennent
désormais les mercenaires russes, ont également activement apporté
la « diversité » dans la région. Pourtant, qui proteste
contre l’immigration illégale (et pas seulement illégale) dans la
région ? Peut-être le Kremlin finance-t-il certains mouvements
pour garder la région slave ? Bien sûr que non. Comme
d’habitude, il n’y a que les nationalistes qui font de telles
choses. Les manifestations de masse contre l’immigration
clandestine (et pas seulement illégale) ont été menées dans la
région
par
les nationalistes
(généralement par Svoboda) – malgré la forte opposition des
gouvernements locaux.
Quelle
en est la raison ? Pourquoi seuls les nationalistes ukrainiens
s’opposent-ils activement à la diffusion des pseudovaleurs
occidentales modernes dans la région – la culture homosexuelle
publique moderne, le pseudomulticulturalisme (un véritable
multiculturalisme ne peut être obtenu que par l’amitié d’États
nationalistes, non par le mélange des populations à travers le
monde), et ainsi de suite ? Ainsi, une grande partie de la
population, en dépit du fait de ne pas se battre, soutient les
mercenaires étrangers financés par le Kremlin, tout comme les
mercenaires étrangers en Syrie ont certains soutiens parmi les
habitants. S’opposeront-ils aux valeurs occidentales à chaque
occasion ?
La raison en est assez
simple. Les personnes qui soutiennent les mercenaires ne sont pas
antioccidentales et antilibérales comme les propagandistes financés
par le Kremlin le disent à destination de l’Ouest (où ils
auraient montré des attitudes antioccidentales avant ces
événements) ; dans leur essence, ils ne sont même pas
prorusses comme le prétend la propagande financée par le Kremlin
pour les gens à l’intérieur de la Fédération de Russie (ou ils
seraient effectivement partis combattre). Ils sont animés par une
haine de tout et tous ceux qui sont Ukrainiens. Malgré des
exceptions, en gros, ce sont les descendants de ceux qui ont été
amenés à l’est de l’Ukraine dans une tentative de nettoyage
ethnique de la région – les descendants des officiers du KGB et du
NKVD conduits dans l’est de l’Ukraine depuis l’Union soviétique
pour pacifier la population locale. Ils ne ressemblent pas aux Russes
de Russie, mais aux Européens de l’ouest ou aux Américains
dénationalisés et c’est de ce point de vue qu’ils considèrent
les populations locales qui sont fières de leur identité.
Essentiellement, ce conflit est entre les Ukrainiens et
ukrainophobes ; entre ceux qui ne reconnaissent même pas les
Ukrainiens en tant que peuple et ceux qui se considèrent comme des
Ukrainiens. Les mercenaires n’ont une forte présence sur le
terrain que dans les régions de Donetsk qui sont peu habitées par
des Ukrainiens.
Comparer
ce qui se passe dans l’est de l’Ukraine avec ce qui s’est passé
à Kiev est un non-sens. À Kiev, il y eut près d’un million de
personnes dans les rues pendant plus de trois mois. Dans l’est de
l’Ukraine, il n’y a eu aucune grande manifestation prorusse avec
plus de quelques milliers de personnes.
Jusqu’à présent, le
gouvernement n’a pas armé les habitants, les Ukrainiens
– l’écrasante majorité de la population. C’est la
principale raison expliquant pourquoi les mercenaires ont été en
mesure de capturer de nombreux bâtiments – combinée avec une
trahison presque totale de la police dans l’est de l’Ukraine
(dont la plupart ont été formés par le précédent gouvernement
Ianoukovitch) et d’étranges tendances pacifistes dans l’armée
(beaucoup attribuent ce fait à l’absence de président officiel en
Ukraine qui prendrait la responsabilité de ces attaques jusqu’aux
élections du 25 mai). Les Ukrainiens de la région – l’écrasante
majorité de la population – ont jusqu’à présent tout
simplement eu peur. Dans un contexte américain, ce serait comme si
des Européens anti-Blancs lourdement armés apparaissaient et
commençaient à patrouiller dans les rues des banlieues typiques.
Beaucoup de
nationalistes ukrainiens se sont engagés pour lutter contre les
mercenaires. Une chose intéressante qu’on remarque presque
immédiatement, c’est que beaucoup de ces nationalistes sont
russophones
– qui ont une loyauté totale pour l’Ukraine
et les Ukrainiens. Le mouvement du Secteur droit a lui-même
récemment
déclaré
que 40 % de son mouvement est composé de russophones, et son
responsable de la presse officielle est lui-même d’origine russe.
En fait, des légions de Russes ethniques en provenance de Russie ont
même été formées pour lutter pour l’Ukraine – ce qui balaye
complètement les bobards mensongers du Kremlin concernant les
russophones en Ukraine orientale et le mythe selon lequel les
nationalistes ukrainiens détestent les Russes. Parler russe en
Ukraine n’est pas un signe de loyauté envers la Russie.
En ce qui concerne le
conflit lui-même, je ne pense pas qu’il y ait beaucoup à dire.
L’armée ukrainienne a été successivement détruite depuis le
début des années 2000 d’abord par Viktor Iouchtchenko, puis par
Viktor Ianoukovitch. L’ironie est que l’Ukraine produit certaines
technologies militaires parmi les plus avancées dans le monde –
comme la technologie des satellites ou les blindés. Mais comme
l’armée n’est pas assez financée, cette technologie est
habituellement vendue à l’étranger. Il a fallu un certain temps
aux militaires pour s’habituer à la lutte contre un ennemi bien
formé et équipé. Essentiellement, ils se battent contre des forces
d’élite spéciales russes – une des, si ce n’est la, meilleure
au monde.
Ce qui rend les choses
plus difficiles, c’est que les mercenaires ont pris des régions
très stratégiques dans des zones densément peuplées – une
attaque massive à grande échelle conduirait à des milliers de
morts parmi les civils et des millions de dollars de pertes en
infrastructures. Pratiquement aucun équipement lourd ne peut être
utilisé – l’essentiel des combats doit être mené au sol,
soldat d’infanterie contre soldat d’infanterie, dans un
environnement très urbain. À grande échelle une invasion russe est
très, très peu probable – en raison de l’état de l’armée
ukrainienne, la Russie ne mettrait sans doute que deux ou trois mois
pour battre l’armée régulière. Pourtant, en raison de la
présence dans l’armée, dans certains cas, de certains matériels
modernes (notamment anti-chars et anti-aériens) – cela signifie
que la Fédération de Russie aurait à utiliser sa marine, son
l’armée de l’air, ses troupes régulières et ses chars pour
vaincre l’armée ukrainienne. Elle perdrait facilement au moins
quelques navires, au moins 30 ou 40 avions, des centaines de chars et
des milliers de soldats. Cela représente des milliards de dollars de
pertes, ce que le Kremlin n’est guère prêt à sacrifier quand la
victoire ne se traduirait ensuite que par une guerre de partisans à
grande échelle qui pourrait finalement conduire à la faillite de la
Russie.
[16]
Le nouveau président de l’Ukraine : diacre, membre actif de
l’Église orthodoxe, Patriarcat de Moscou.]Le nouvel espoir de
certains nationalistes ? Ennemi de l’Occident ?
Tout récemment, les
élections en Ukraine ont eu lieu. Elles se sont tenues avec succès
dans chacune des régions du pays, à l’exception de deux régions
de la région du Donbass à l’extrême-est de l’Ukraine. Petro
Porochenko est devenu le nouveau président de l’Ukraine. Bien sûr,
c’est décevant. Il est vrai que c’est un oligarque, ce qui a
souvent été mentionné dans la propagande financée par le Kremlin.
Ce qui n’est pas mentionné, ce n’est évidemment pas un hasard,
c’est qu’il est également un membre actif du Patriarcat de
Moscou de l’Église orthodoxe et y a même servi comme diacre. Non
seulement Poutine, mais même Douguine lui-même ne prend pas une
part aussi active dans l’Église orthodoxe – peut-être cela
signifie-t-il que les nationalistes devraient effectivement s’unir
autour de Porochenko ?
Je plaisante, bien sûr…
VI.
Svoboda, le Secteur droit, et l’avenir du nationalisme ukrainien
Beaucoup de
nationalistes occidentaux demandent : pourquoi les nationalistes
ukrainiens combattent seulement les mercenaires dans l’est de
l’Ukraine, et pas le gouvernement ukrainien libéral au pouvoir ?
Globalement, il y a
deux mouvements nationalistes ukrainiens ou organisations existant à
l’heure actuelle : le parti Svoboda et le mouvement Secteur
droit. Malheureusement, aujourd’hui, une énorme quantité de
friction et de haine mutuelle existe entre eux. Toutefois,
heureusement, au niveaux local, les militants des deux organisations
travaillent en étroite collaboration.
Le parti Svoboda a
existé sous différentes formes depuis 1991. En 2012, il a remporté
environ 10 % des votes au Parlement ukrainien. À la fin de
2012, il a eu l’« honneur » de voir deux de ses
dirigeants dénoncés par le centre Simon Wiesenthal parmi les dix
plus gros « antisémites © » dans le monde. Le programme
du parti est de loin le plus radical, anticapitaliste et antilibéral
parmi les organisations importantes qui existent en Europe. Il
contient des idées telles que l’interdiction de l’usure, la
création d’un système d’exploitation informatique ukrainien
devant être utilisé sur le territoire de l’Ukraine à la place de
Microsoft Windows, restreindre sévèrement les nouvelles et
informations étrangères en Ukraine, interdire la propagande
homosexuelle, interdire la publicité pour l’alcool et les
cigarettes (avec des tentatives ultérieures de les interdire
ensuite), interdire à quiconque n’étant pas ukrainien par
l’appartenance ethnique d’obtenir la nationalité ukrainienne,
avoir un État promouvant le christianisme. Il y a aussi de nombreux
points concernant la nationalisation de l’industrie et des
affaires, le retour au statut nucléaire de l’Ukraine,
l’interdiction de partis « ukrainophobes » et beaucoup
d’autres grands projets.
Le programme de Svoboda
est un mélange de tous les éléments positifs du
strassérisme
classique et du nationalisme moderne. Pendant les élections de 2012,
beaucoup ont voté pour Svoboda en espérant que le parti combattrait
les oligarques – en effet, de nombreux anciens communistes ont même
voté pour le parti en raison du programme économique
anticapitaliste du parti.
Pour diverses raisons,
cela ne s’est pas réalisé, et, à l’intérieur du parlement,
Svoboda est devenu relativement pacifique. Cela a déçu beaucoup de
gens, mais Svoboda a continué (et continue) à procéder à de
nombreuses initiatives pour les jeunes et d’autres, en particulier
des camps patriotiques où les gens peuvent faire du sport, apprendre
à utiliser des armes, et ainsi de suite. Pendant les manifestations
de 2013-2014, Svoboda a joué un rôle énorme et une grande part de
ces formations a été utile – c’est Svoboda qui a contrôlé la
plupart des bâtiments capturés et en a fait des endroits assez
sûrs, agréables, et ordonnés. C’est Svoboda qui a fait tout ce
qui pouvait être fait à partir de ces bâtiments pour propager le
nationalisme – que ce soit par la réalisation de conférences, en
accueillant nationalistes étrangers, ou en projetant des films.
C’est Svoboda qui a payé pour entretenir ces bâtiments et gérer
beaucoup des plus grandes scènes.
Pourtant, beaucoup ont
été très déçus par la position de Svoboda dans de nombreux
aspects durant les manifestations – Svoboda a constamment mis en
garde ses membres contre la violence dans les rues et, aux environs
de janvier, a accepté globalement comme un fait qu’il ne serait
pas possible de renverser Ianoukovitch, optant plutôt pour la mise
en place des négociations.
Ceci, avec les appels
de Svoboda durant les manifestations de s’abstenir d’être
violent, a conduit à l’émergence du Secteur droit qui a récupéré
beaucoup de gens déçus par Svoboda. Le Secteur droit est une
coordination regroupant de nombreuses petites organisations
nationalistes qui existaient bien avant, des organisations de nature
plus chrétiennes que nationalistes jusqu’aux nationalistes
radicaux. Dès le début, le Secteur droit s'est positionné comme
une alternative directe à Svoboda. Idéologiquement, en matière
d’économie et ainsi de suite, les mouvements sont, globalement,
similaires. Le chef du Secteur droit, Dmytro Yarosh, était
auparavant le chef de l’organisation Tryzub – une organisation
nationaliste chrétienne existant depuis le début des années 1990.
Un élément clé pour
comprendre l’Ukraine est que le pays ressemble aux pays occidentaux
dans les années 1970 – où il y existait encore une solidarité
générale entre les membres de la nation, à la fois spirituellement
et dans le sang. Personne ne s’inquiète si vous dites que vous
êtes « nationaliste » – il n’y a pratiquement aucune
stigmatisation que ce soit.
Cela a de bons et de
mauvais cotés. C’est bien parce que les nationalistes ont
globalement accès aux médias, au gouvernement, et ainsi de suite à
un niveau qui serait impensable à l’Ouest. C’est regrettable
parce que, pour le citoyen lambda, il n’est pas facile de
comprendre qui est véritablement nationaliste, qui veut défendre la
nation ukrainienne, et qui est un libéral qui veut vendre le pays
aux sociétés internationales.
Personne n’est
ouvertement libéral en Ukraine. Tout se passe dans les coulisses.
Les élites préparent l’Ukraine avec un avenir dans le cadre de
l’Europe occidentale – et pourtant ils font tout dans le secret,
se cachant des yeux de la population. Et publiquement, ils nient.
Par exemple, de hauts
cadres du parti de Ioulia Timochenko ont essayé
de
faire
passer
une loi
interdisant la propagande LGBT en Ukraine. Un membre de ce parti
a
déclaré
que les «
immigrants d’Inde et d’Afrique, ainsi que les
oligarques juifs sont les principales menaces pour l’Ukraine ».
Aucun de ces deux cas
n’a provoqué de controverse. En réalité, ce sont des exceptions
– une façon de se présenter sous un faux jour –, mais ce ne
sont pas les politiques du parti. Le parti est rempli d’agents
libéraux, occidentaux. Mais le citoyen moyen ne le sait pas, et
ainsi, comme de nombreux nationalistes, soutient ce parti.
Des choses semblables
peuvent être dites des autres partis qui sont considérés comme
pro-occidentaux en Ukraine. Ils sont pro-occidentaux dans la réalité,
mais ils sont perçus par le citoyen moyen, par des manipulations
réussies, comme étant pro-ukrainiens et même patriotes. Il est
difficile pour les nationalistes de se différencier de ces partis
sans avoir l’air anormaux pour la plupart des gens. Ceci est un
problème.
Il y a eu, bien sûr,
beaucoup d’animosité entre les nationalistes et le gouvernement
actuel, qu’il s’agisse de nationalistes défendant l’Ukraine
dans une manifestation brutalement attaquée sur ordre du
gouvernement, ou d’un affrontement récent entre les nationalistes
et les forces de sécurité progouvernementales à Maïdan. Après
les résultats des élections, les groupes nationalistes sur les
réseaux sociaux ont laissé éclater leur colère contre le nouveau
président.
Mais pour le moment, la
question importante est qu’une force étrangère a envahi
l’Ukraine. Ce n’est pas une guerre civile. C’est considéré
par pratiquement tout le monde en Ukraine comme une invasion russe.
Si l’on demande pourquoi les nationalistes ne combattent pas le
gouvernement, il faut se demander pourquoi les nationalistes
britanniques, polonais, français et ainsi de suite n’ont pas
combattu leurs gouvernements lorsque leurs pays étaient en guerre
contre l’Allemagne national-socialiste – d’autant plus que
l’Allemagne nationale-socialiste représentait véritablement, au
moins dans une large mesure, une alternative nationaliste ethnique et
n’était pas une démocratie libérale typique comme la Fédération
de Russie moderne. Est-ce que les nationalistes britanniques,
polonais et français, étaient, comment certains « intellectuels »
pourraient le dire, « des agents américains, travaillant pour
l’atlantisme » ?
En fait, la plus grande
résistance aux mercenaires dans l’est de l’Ukraine n’est pas
organisée par l’État lui-même, mais par des réseaux de
patriotes ukrainiens – patriotes à l’intérieur de l’armée, à
l’intérieur de la police, des médecins, des travailleurs et des
mouvements nationalistes sur le terrain. C’est, tout comme à
Maïdan, une quantité incroyable d’organisation civile de gens
ordinaires. C'est, clairement, une guerre du peuple ; c’est
véritablement le peuple ukrainien qui résiste au Kremlin, et qui
essaye de sauver l’idée même d’un État ukrainien. L’État
ukrainien moderne existe en grande partie pour défendre les intérêts
des oligarques, et non les intérêts des Ukrainiens, et il a peu
d’intérêt pour une opération massive qui coûterait des millions
de dollars.
Ceux qui demandent
pourquoi les nationalistes ukrainiens n’ont pas attaqué le
gouvernement durant une invasion étrangère doivent repenser la
question. Le fait est que les nationalistes ukrainiens sont des gens
ordinaires – des gens qui ont aussi des emplois et des
responsabilités dans la vie quotidienne et dont la vie est loin
d’être financièrement aisée. (En effet, la vie en Ukraine
n’était pas vraiment facile avant ces événements, mais, depuis
l’invasion, l’économie s’est effondrée.)
La vraie question est :
pourquoi la Fédération de Russie – une superpuissance avec
des milliards de dollars de ressources et l’un des réseaux les
plus sophistiqués d’espions dans le monde – combat-elle les
nationalistes ukrainiens ? Pourquoi la Fédération de Russie n’a
absolument rien fait pour arrêter la propagation du libéralisme
occidental en Ukraine, finançant seulement les mouvements en Ukraine
qui luttent contre les groupes qui combattent ce même libéralisme ?
Il n’est pas possible
de considérer, même une seconde, que la Russie ne sait pas ce qui
se passe en Ukraine. La sécurité d’État russe, le FSB et les
services de renseignement de l’État sont parmi les meilleurs dans
le monde. Ils sont bien conscients de qui est qui en Ukraine. Ils
sont bien conscients qu’en parlant de « Novorussia »
(« Nouvelle Russie ») (un terme que Poutine utilise pour
l’Est de l’Ukraine et que les Ukrainiens considèrent comme
péjoratif) et par l’envoi de mercenaires en Ukraine, l’écrasante
majorité de la population se retournera contre eux. Les politiques
identitaires naturelles fonctionneront – la majorité de la
population de l’Ukraine s’unira autour de l’identité nationale
ukrainienne contre une menace d’une identité étrangère.
Je dirige moi-même un
site antilibéral en Ukraine, un site assez connu qui favorise en
permanence l’opposition à l’UE, l’OTAN et ainsi de suite.
Lorsque les agents occidentaux regardent le site, ils nous accusent
immédiatement d’être financés par la Fédération de Russie. Je
pense toujours en moi-même – ne serait-ce pas merveilleux si
c’était vrai ? Tout serait tellement plus facile ! Si
nous avions 1/10000e de l’argent que les agents
occidentaux ont en Ukraine, nous serions déjà au pouvoir. Pourtant,
nous ne recevons rien.
Bien au contraire, en
fait.
Parce que nous ne
voulons pas que notre identité nationale disparaisse et que nous
nous opposons aux mercenaires russes, nous sommes attaqués sur tous
les fronts par ces mêmes agents russes et affublés de tous les
noms, de néonazis © à agents américains.
Et encore, si seulement
ils nous aidaient, nous – plutôt que d’aider les groupes
d’individus essentiellement libéraux qui grincent des dents à
toute mention de l’identité ukrainienne – les choses pourraient
être très différentes.
Le nationalisme
ukrainien est loin d’être antirusse. Au début du XXe
siècle, les nationalistes, en particulier ceux d’Ukraine
occidentale, voulaient activement travailler avec Moscou – les
mêmes nationalistes qui plus tard formèrent l’Organisation des
nationalistes ukrainiens qui a été incroyablement diabolisée par
le Kremlin moderne. Malheureusement, ils ont tous été ignorés ou
moqués par Moscou et de ce fait, le potentiel de coopération a
disparu. La Russie sait que la seule force qui combat activement le
libéralisme et toutes les tendances négatives qui lui sont
associées en Ukraine sont les nationalistes ukrainiens – et il a
très certainement la connaissance et l’argent pour financer un
mouvement nationaliste ukrainien. Un tel mouvement emporterait
complètement le facteur ukrainien d’identité actuellement en
lutte contre les mercenaires russes en Ukraine. Il serait également
beaucoup moins coûteux.
Plutôt que de se
demander pourquoi les nationalistes ukrainiens s’opposent à la
Fédération de Russie et (apparemment) ne combattent pas libéraux
ukrainiens et les agents occidentaux, il faut se demander pourquoi la
Fédération de Russie se bat seulement contre les nationalistes
ukrainiens et ne combat pas les libéraux ukrainiens ou les agents
occidentaux en Ukraine.
Ce n’est pas grave
s’ils n’aiment pas les mouvements nationalistes actuels en
Ukraine – ils pourraient en créer un nouveau. Mais ils ne le font
pas. C’est la question clé.
Pourquoi, si la Russie
est vraiment une menace pour l’oligarchie mondiale, les
nationalistes ukrainiens sont-ils la seule cible de la propagande
russe et pas les libéraux ukrainiens ? Peut-on imaginer un pays
comme l’Iran traitant le Hezbollah (qui à l’origine n’était
pas une organisation loyale à l’Iran, jusqu’à ce que les
services secrets iraniens y placent leurs propres hommes) ou le Hamas
de « terroriste » ? Peut-on imaginer l’Iran
finançant des persanophones libéraux dans la « lutte
contre l’extrémisme islamique », même en tenant compte
d’une base de l’OTAN dans le pays ?
Bien sûr que non –
parce que l’Iran est une véritable alternative, un État en dehors
du règne de l’oligarchie mondiale.
Les problèmes en cours
en Ukraine sont très complexes et, largement, complètement
incompris par les nationalistes et autres dissidents à l’Ouest. La
principale raison en est l’absence totale et absolue d’informations
de la part des nationalistes ukrainiens en langues étrangères. Je
résume ici les principaux points :
Les
événements du Maïdan étaient des protestations de gens
ordinaires contre un régime incroyablement corrompu,
pro-occidental, libéral en Ukraine, que la Russie a également
soutenu et auquel l’Occident est resté fidèle jusqu’à la fin.
Les
protestations ont commencé non pas à cause du refus du
gouvernement de ne pas signer un accord avec l’UE (bien que le
même gouvernement eut promeut le même accord pendant des années
de toutes les manières possibles), mais en raison d’un violent
passage à tabac de manifestants non armés dans le centre de Kiev
qui fut connu de toute de l’Ukraine. Ce fut la goutte d’eau de
trop après des années de domination de la mafia.
Le
rôle des nationalistes fut énorme – la haine ordinaire contre le
régime a été transformée en énergie en pro-ukrainienne et
patriotique et le régime a été considéré comme ouvertement
antinational.
Après
que le gouvernement eut été renversé, la confiance des Ukrainiens
moyens envers l’Ouest s’est effondrée – il est apparu qu’une
véritable révolution nationaliste antilibérale était imminente.
Mais
c’est alors que le conflit avec la Fédération de Russie a
commencé. Plutôt que de capitaliser sur la chute du soutien à
l’UE et à l’OTAN, en fait, la Fédération de Russie a fait
tout son possible pour convaincre les Ukrainiens moyens de redevenir
pro-occidentaux. Cela a été fait par la première invasion en
Crimée, lorsque l’Ukraine était dans un état d’anarchie, puis
l’invasion à l’est de l’Ukraine.
À
l’intérieur de la Fédération de Russie, toute véritable
opposition orthodoxe et nationaliste au régime a été détruite,
mais l’opposition ouvertement libérale est autorisée et peut
fonctionner sans problème. La Russie est globalement une fausse
opposition à l’oligarchie mondiale en général et à l’Occident
en particulier.
En
fait, un article plus détaillé devrait évoquer la façon dont la
Fédération de Russie est une garantie contre toute force
révolutionnaire potentielle réelle
– un groupe des
élites nationalistes qui aurait l’espoir d’être suivi. Les
menées bellicistes de l’élite libérale de la Fédération de
Russie et de ses comparses parmi les « conservateurs »
ressemblent de près aux menées bellicistes au Proche-Orient des
néoconservateurs aux États-Unis et leurs prétendus conservateurs.
Il est difficile de
prédire l’avenir en Ukraine – il semble maintenant que dans un
futur proche, les libéraux soutenus par la Russie et l’Occident,
mettront en place une oppression violente à grande échelle contre
les nationalistes ukrainiens, comme avant les événements de
2013-2014. La clé entre cela et aujourd’hui est de savoir si
l’Ukraine se maintiendra dans toutes les régions de l’est de
l’Ukraine et si les nationalistes ukrainiens seront prêts à
affronter ce qui nous attend. Ce n’est qu’en battant une fois
pour toutes une grande partie de ces forces violemment
anti-ukrainiennes – qui sont idéologiquement libérales, mais
simplement ouvertement opposée à toute expression de l’identité
ukrainienne – qu’il sera possible pour les nationalistes
ukrainiens d’être finalement en mesure de mener une guerre sur un,
et non deux fronts.
Mais qui sait – les
événements récents montrent que chaque fois que l’Ukraine et les
nationalistes ukrainiens ont eu une chance de combattre les libéraux
occidentaux face à face ces mêmes libéraux occidentaux sont
généralement sauvés par le Kremlin.